La pandémie de COVID-19 a tué à ce jour plus de 2,6 millions de personnes dans le monde, soit à peu près la population de la Lituanie. Cette crise sanitaire est sans doute le plus grand événement du siècle actuel, et les journalistes en font partie intégrante.
Heureusement, les scientifiques du monde entier ont mis au point en un temps record plusieurs vaccins très efficaces pour assurer une protection contre le virus.
Le déploiement des vaccins est désormais bien avancé à l'échelle mondiale et les journalistes s'interrogent sur l'urgence de se faire vacciner, compte tenu des risques associés à de nombreux types de reportages. Ils se posent ainsi la question de leurs perspectives, de l'éthique et de l'impact de la vaccination sur la couverture médiatique.
Voici les paramètres que les journalistes du monde entier doivent prendre en compte afin d'accéder au vaccin :
Quelle stratégie est appliquée dans votre pays ?
Les lois sont très différentes à travers la planète. Aux États-Unis, seule une poignée d'États, dont le Colorado et la Virginie, considèrent les journalistes comme essentiels. Des pays comme le Zimbabwe ont également désigné les journalistes comme essentiels. Même La Russie a vacciné des journalistes de médias d'État et des indépendants.
De nombreux pays éprouvent des difficultés à déployer les vaccins. Le Canada, par exemple, est à la traîne, tout comme une grande partie de l'Europe. Ces pays n'ont pas accordé la priorité aux journalistes.
La réalité est que la décision et la capacité de la plupart des gens à se faire vacciner auront peu à voir avec leur profession, et tout à voir avec leur vie personnelle et leur santé. "Pour les reportages que je fais, je peux le plus souvent utiliser le téléphone", déclare Shivani Persad, une journaliste indépendante basée dans la région de Toronto. "Je suis plus préoccupée par mes parents qui sont septuagénaires, et par ma tante avec qui je vis également, qui l'est aussi."
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Quels sujets couvrez-vous ?
Le journalisme est un travail de première ligne, cela est devenu évident l'année dernière. Les journalistes étaient dans les rues pour couvrir les manifestations, comme celles contre la fraude électorale en Biélorussie, et celles démarrées suite au meurtre de George Floyd par la police aux États-Unis. Les journalistes ont traqué les dirigeants mondiaux qui ont semé la division et la confusion autour du COVID-19, comme le président brésilien Jair Bolsonaro et l'ancien président américain Donald Trump.
Cependant, tous les journalistes ne couvrent pas ces sujets de première ligne. Par exemple, l'auteur culinaire Leah Koenig et Seth Rudetsky, animateur de l'émission ON BROADWAY sur SiriusXM, effectuent facilement leurs reportages à distance.
L'urgence de recevoir un vaccin peut dépendre de la possibilité de faire son travail et de couvrir ses sujets sans se mettre en danger. C'est le cas de Thor Benson, un journaliste indépendant basé à la Nouvelle-Orléans, en Louisiane. "Je me suis intentionnellement concentré sur les sujets que je pouvais faire depuis chez moi", dit-il à IJNet. "Je ne suis pas vacciné, donc je préfère ne pas me mettre en danger." M. Benson a récemment annoncé qu'il se fera bientôt vacciner, ce qui, espérons-le, élargira ses possibilités de reportages.
D'autres journalistes n'ont pas autant de contrôle sur les sujets qu'ils couvrent et ne peuvent pas nécessairement choisir de ne pas couvrir des sujets qui les mettent en danger. Luna Swafan, journaliste indépendante au Liban, a tweeté en janvier : "Donc si je vais réaliser neuf sujets dans les hôpitaux aujourd'hui, ou si on me commande des reportages dans ces lieux... je ne serai toujours pas une priorité ? Parce que les journalistes ne sont appréciés et aimés que lorsque cela arrange tout le monde ? Walaw ?"
De nombreux journalistes sont capables de produire des reportages de la même qualité par téléphone ou lors d'un appel Zoom, que lors d'un point presse ou depuis la rédaction. Ce n'est toutefois pas le cas de Brittany Kriegstein, journaliste au New York Daily News. "Travailler à domicile n'a jamais été une option pour moi", explique-t-elle à IJNet. "Chaque jour, je suis chez les gens pour les interviewer. Bien souvent, ils ne portent pas de masque."
Elle ajoute : "Lorsque vous interviewez quelqu'un au sujet de son mari qui vient d'être abattu au coin de la rue ou de son fils qui vient d'être poignardé dans une bagarre de quartier, c'est difficile. Lorsque vous essayez d'avoir accès à la famille et de la mettre à l'aise et qu'ils pleurent, il est compliqué de leur demander de mettre un masque."
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Mme Kriegstein a également passé l'année dernière dans des conférences de presse à couvrir l'évolution de la maladie à New York. "En gros, c'est ce que vous feriez si vous vouliez attraper le COVID", dit-elle, en faisant remarquer qu'elle était la seule des journalistes terrain de son équipe à ne pas avoir contracté le virus.
Mme Kriegstein a récemment été vaccinée. Elle s'est rendue à Long Island, où vivent ses parents, avec une lettre de son rédacteur en chef indiquant qu'elle était une travailleuse essentielle en lien avec le public. Elle demande aujourd'hui que ses collègues puissent se faire vacciner eux aussi.
Votre statut professionnel
Le secteur de l'actualité s'appuie de plus en plus sur des freelances. Les emplois salariés se faisant de plus en plus rares, les reporters indépendants sont souvent envoyés en première ligne lorsqu'un événement important se produit. Malheureusement, ces entrepreneurs indépendants ont rarement droit à une assurance de la part de leur employeur.
"Les freelances sont toujours les moins protégés et les moins soutenus par les institutions. Ils n'ont pas toujours la possibilité de prévoir à l'avance les missions qui leur seront confiées", explique Carly Stern, journaliste indépendante basée à San Francisco. "Il est important de prendre en compte leurs besoins spécifiques, la manière dont ils accèdent aux ressources et de leurs vulnérabilités spécifiques au travail."
Andy Hirschfeld est un reporter basé à New York. Il est spécialiste des questions liées au coût de la vie. Il écrit pour Al Jazeera English, Observer, OZY, Salon, CNBC et beaucoup d'autres. IL présente également le programme économique d'envergure nationale Business Brief.
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