ANMO : ces journalistes écrivent sur les réfugiés en temps de pandémie, malgré les difficultés

17 mai 2021 dans Sujets spécialisés
Un bateau abandonné sur une plage, très abîmé

L'organisation mère d'IJNet, l'ICFJ, s'est associée au Facebook Journalism Project dans le cadre de son programme Reporting on Refugee Communities Amidst a Pandemic (Couvrir les réfugiés pendant une pandémie). Cet article est le deuxième d'une série de trois mettant en avant les reportages des participants au programme. Lire le premier article ici


Le COVID-19 a aggravé des conditions de vie déjà difficiles dans de nombreux pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, notamment ceux qui connaissent des problèmes économiques et des conflits armés. Ces difficultés se répercutent souvent au sein des groupes vulnérables, notamment les personnes en situation de pauvreté et les réfugiés.

Dans le cadre du programme de formation ICFJ-Facebook Journalism Project, des journalistes de la région ont produit de convaincants reportages approfondis sur l'impact du COVID-19 sur les communautés de réfugiés. Voici un aperçu des projets publiés au Yémen, en Irak et dans d'autres pays de la région ANMO et des défis que les journalistes ont dû relever pour mener à bien leur travail.

Yémen

La journaliste indépendante yéménite Sahar Mohamed Abdul Razzaq a réalisé un reportage publié par Al-Mushahed sur les fonds internationaux distribués au Yémen pour faire face au COVID-19. Mme Razzaq a déclaré qu'elle avait eu du mal à accéder aux camps de réfugiés en raison du manque de sécurité. Communiquer avec les organisations qui travaillent avec les personnes déplacées et les réfugiés était également difficile.

La journaliste Rania Farhan a fait un reportage sur le statut des femmes dans une région qui manque de services de santé de base. Elle a parcouru de longues distances pour interviewer des réfugiées en personne, ce qui a été compliqué par les problèmes de sécurité dans le pays. Son reportage final a été publié sur la chaîne d'information yéménite Belqees TV.

Le reportage du journaliste indépendant Rafat Almamary, intitulé Les marginaux du Yémen: entre l'enfer de la guerre et la pandémie a été publié par Al-Mushahed. "Les difficultés les plus importantes que j'ai rencontrées lors de la préparation du reportage étaient que ma principale source, qui avait été infectée par le coronavirus, avait peur d'apparaître dans les médias", explique-t-il. "Parmi les autres difficultés, citons les conditions de sécurité et les longues distances à parcourir pour photographier les camps de personnes déplacées, ainsi que leur proximité avec des zones de combat et d'affrontements."

[Lire aussi : Couvrir les réfugiés en Egypte et au Maroc pendant la pandémie]

 

Le journaliste Bassam Al-Qadhi a publié un article sur Al-Ayyam, intitulé Les réfugiés au Yémen font face au coronavirus sans eau. Parmi les défis qu'il a dû relever, M. Al-Qadhi a dû se battre pour obtenir l'autorisation des autorités chargées de la sécurité afin de pouvoir filmer dans les camps de réfugiés.

Dans un court documentaire, le journaliste Haitham Alqaoud met en lumière la vie des réfugiés africains au Yémen et comment ils sont arrivés dans le pays. Il partage leurs histoires à la lumière du COVID-19, qui a exacerbé la souffrance des Yéménites et des réfugiés.

M. Alqaoud a dû faire face aux problèmes de connexion à Internet au Yémen, ce qui a rendu la communication plus difficile. Il a également eu des difficultés à obtenir des autorisations lui permettant de photographier les camps et n'a reçu aucune réponse des agences des Nations unies concernant sa demande de se rendre dans les camps pour mener des entretiens avec les réfugiés.

La journaliste Abeer Maresh a réalisé un reportage sur les réfugiés au Yémen confrontés au coronavirus alors que plus de la moitié des médecins (52 %) du gouvernorat de Taiz ont quitté la région en raison de la guerre en cours dans le pays. La migration des médecins n'a fait qu'accentuer la gravité de la crise, rendant l'accès à des soins adéquats encore plus difficile pour les réfugiés de la région. C'est le problème le plus important de la pandémie, raconte Mme Maresh, ajoutant que les résidents des camps ne savent pas comment se protéger de la propagation d'épidémies comme le coronavirus.

Irak

La journaliste et cinéaste irakienne Farah Adnan Raoof Al-Rubaye a produit un podcast d'investigation de 30 minutes, diffusé par Raseef22, qui s'intéresse à l'impact économique de la pandémie sur les réfugiés syriens et palestiniens à l'intérieur et à l'extérieur des camps en Irak. "La pandémie a imposé des restrictions de déplacement, en plus des difficultés créées par certaines institutions qui exigent une demande officielle avant de réaliser toute interview", dit-elle à propos des défis auxquels elle a été confrontée lors de ses reportages.

La journaliste Sanar Hasan a rédigé l'article Exploitation, harcèlement et crime : les dessous de la vie d'enfants mendiant dans les rues de Bagdad, qui a été publié par Al-Jazeera. "J'ai été confronté à la réticence des familles d'enfants déplacés à faire apparaître leurs enfants dans un reportage ou à parler de leurs conditions de travail", raconte Mme Hasan. "[Les familles] craignaient également les gangs pour lesquels les enfants travaillent."

Le journaliste Inass Halim Dakhel a produit un reportage vidéo qui examine les effets de la pandémie sur la santé mentale et physique des femmes déplacées dans le camp de Baharka, dans le gouvernorat d'Erbil, en Irak. Le reportage a été diffusé sur Al-Rasheed.

Basée à Bagdad, Mme Dakhel a eu des difficultés à aller au camp et à trouver des femmes prêtes à parler de leurs souffrances devant la caméra. Elle a également eu du mal à communiquer avec le photographe, qui travaille à Erbil, à plus de 300 kilomètres d'elle.

Libye

La journaliste libyenne Ibtisam Agfer a rendu compte des effets de la pandémie sur le camp de réfugiés de Tawergha à Benghazi pour Africa Gate News. Son reportage comporte à la fois du texte et des photos. La situation la plus difficile à laquelle elle a été confrontée a été de trouver des réfugiés qui étaient prêts à parler, dit-elle, car beaucoup dans le camp refusaient. Mme Agfer a été expulsée du camp elle-même.

Turquie

Nihad Dahman, journaliste et réalisatrice basée en Turquie, a réalisé un reportage sur les personnes déplacées pendant la pandémie. Elle a expliqué comment elle s'est battue pour atteindre les personnes contaminées par le virus afin de parler de leur vécu. Un autre défi était de gérer les différents services gouvernementaux afin d'obtenir les autorisations nécessaires pour pouvoir réaliser son reportage.

Tunisie

Le journaliste tunisien Mohamed Balti a réalisé un reportage vidéo pour Radio Tunisienne sur l'expérience d'un réfugié qui a réussi à s'intégrer dans la communauté locale. Dans l'article, M. Balti explique comment les réfugiés peuvent bénéficier des programmes d'aide humanitaire.

[Lire aussi : Le COVID-19 révèle les limites des reportages sur la migration en Tunisie]

Liban

Au Liban, l'article du journaliste Tarek Abd Elgalil, Le mariage précoce emprisonne les femmes réfugiées syriennes au Liban : une histoire tragique de privation d'éducation, publié par Daraj, étudie comment le COVID-19 a conduit certaines familles à forcer leurs filles mineures à abandonner l'école et à se marier afin d'économiser des frais.

Parmi les défis qu'il a dû relever pour réaliser ce reportage, M. Abd Elgalil a dû faire face au confinement strict du Liban pendant la pandémie. Il a également eu du mal à trouver des réfugiés prêts à être interviewés sur un sujet aussi sensible.


Sarah Abdallah est doctorante en linguistique et communication. Elle a étudié le droit, les sciences politiques et l'ingénierie linguistique. Elle est la traductrice d'IJNet en arabe et journaliste pour l'Orient Le Jour.

Cet article a été initialement publié sur notre site IJNet en arabe.

Image principale sous licence CC par Unsplash via Christopher Eden.