Comment parler des effets secondaires des vaccins contre le COVID-19

4 nov 2021 dans Couvrir le COVID-19
Vaccination

Alors que la pandémie se poursuit, il est essentiel que les journalistes aident le public à comprendre les vaccins contre le COVID-19 grâce à des reportages précis, accessibles et qui tiennent compte de leurs émotions et de leurs préoccupations.

Il s'agit notamment de fournir une couverture fiable des effets secondaires connus des vaccins. Cela implique également de passer au crible les rumeurs non confirmées qui ont circulé à leur sujet, explique Kerry Dooley Young, journaliste indépendante et référente des études médicales sur la sécurité des patients au sein de l'Association of Health Care Journalists, lors d'un récent webinaire du Forum mondial de reportage sur la crise sanitaire de l'ICFJ.

Comme tout produit pharmaceutique, les vaccins peuvent avoir des effets secondaires. Les effets les plus courants des vaccins contre le COVID-19 sont mineurs. Ils comprennent, entre autres, une éventuelle fatigue, des maux de tête et des douleurs musculaires, qui peuvent durer jusqu'à plusieurs jours. Les effets secondaires plus graves, comme la myocardite et les caillots sanguins, sont extrêmement rares, dit Mme Young.

Pourtant, de nombreuses informations erronées circulent sur les effets secondaires graves des vaccins. Par exemple, des récits de problèmes de fertilité se sont répandus, mais ils ne sont pas vérifiés. Le CDC recommande d'ailleurs que les femmes qui essaient d'enfanter reçoivent le vaccin. De nombreux autres rapports non confirmés sur les effets secondaires des vaccins ont circulé dans la base de données VAERS du CDC, que les fabricants de vaccins surveillent régulièrement.

[Lire aussi : Nos conseils pour parler de l'hésitation face à la vaccination]

 

"Il est préférable de se faire vacciner plutôt que de risquer de contracter le COVID", assure Mme Young, en précisant que la corrélation établie dans les récits individuels non vérifiés sur les effets secondaires des vaccins n'implique pas de lien de causalité.

Une communication claire est essentielle. Mme Young a souligné une spécificité de taille concernant la couverture des questions de santé liées au COVID-19 : le rythme rapide des informations sur la pandémie signifie que les journalistes doivent veiller à ne pas diffuser des informations non vérifiées. "Si les affirmations sont faites par une communauté médicale de confiance, elles sont légitimes", dit-elle. "Il ne s'agit plus aujourd'hui de reportage sanitaire peaufiné, comme c'était le cas avant la pandémie. Nous apprenons tous les choses au même moment."

Les journalistes ne doivent pas plaider aveuglément en faveur des vaccins, et leurs reportages ne doivent pas non plus susciter d'hésitation face à la vaccination. Dans le cadre de leurs reportages, les journalistes doivent être attentifs à la façon dont les gens réagissent à ces informations.

Voici les principales conclusions du webinaire.

Comment parler des chiffres

  • Il est important que vos reportages ne deviennent pas une "soupe aux chiffres". Au lieu de cela, fournissez les éléments de contexte nécessaires, toujours en utilisant des données, pour humaniser votre papier. Cela peut aider à mieux communiquer les résultats réels et à lutter contre l'hésitation face à la vaccination.
  • De nombreuses personnes qui hésitent à se faire vacciner se disent préoccupées par la rapidité avec laquelle les vaccins ont été mis au point et par la quantité de données dont on dispose sur leur efficacité. Pour ces personnes, il peut être facile de faire des suppositions sur les effets secondaires des vaccins, même si elles ne sont pas vérifiées, explique Mme Young. "C'est vraiment difficile à aborder. La réaction émotionnelle est tellement plus importante que les données. Vous ne pouvez pas simplement toucher les gens avec des chiffres. Les personnes qui sont déjà réfractaires ne liront pas ce papier-là," ajoute-elle. "Allez à la rencontre des gens là où ils sont. Il faut que ce soit une conversation."
  • Le rythme rapide des recherches autour de la pandémie, qu'elles soient nouvelles ou déjà en cours, signifie que transmettre des données avec précision et efficacité peut être complexe. "Si je vous donne des chiffres aujourd'hui, il est possible qu'ils ne soient plus bons demain", admet Mme Young. Les journalistes doivent être vigilants et s'assurer que les sources des données et les citations qu'ils utilisent dans leurs articles sont fiables et à jour.

Faire appel à des sources fiables

  • La prolifération de la désinformation autour du COVID-19 s'est étendue aux rumeurs non vérifiées concernant les vaccins. "Si quelque chose arrive aux gens après qu'ils aient reçu le vaccin, en particulier le vaccin contre le COVID, ils établiront un lien", explique Mme Young, même si les deux choses n'ont aucun rapport. "C'est ce que nous voyons beaucoup avec les inquiétudes [non fondées] concernant les fausses couches et la fertilité. C'est devenu très intense."
  • Il est important de rechercher des informations auprès de sources crédibles, notamment au niveau régional. Voici quelques exemples de ressources utiles, disponibles en plusieurs langues :
  • Parler avec des professionnels de la santé et des chercheurs travaillant dans les communautés locales peut aider à combler les lacunes en matière d'information. Il peut être utile de comprendre comment les médecins gèrent les informations erronées qui se sont répandues dans leurs communautés lorsqu'ils parlent à leurs patients des faits avérés concernant les vaccins, suggère Mme Young.
  • S'il est important de rendre votre reportage accessible aux lecteurs et "d'aller à leur rencontre là où ils en sont", ne délaissez pas complètement les termes clefs. "Optez pour une description plus simple, mais incluez des mots de jargon parce que c'est ce que les gens ont lu ailleurs. S'ils veulent faire plus de recherches par eux-mêmes, ils auront besoin de ces termes", explique Mme Young. "Je présenterais le concept, puis j'introduirais le jargon".

[Lire aussi : Cinq conseils aux médias locaux pour couvrir la vaccination contre le COVID-19]

Prendre le temps nécessaire

  • Avant de publier un article, les journalistes doivent défendre les intérêts de leurs lecteurs. Mme Young conseille de se poser la question suivante : "N'ai-je pas uniquement rapporté des chiffres, mais également les ressentis des gens par rapport à ces chiffres ? Comment les gens vont-ils réagir ?"
  • Les journalistes doivent mettre en avant les rapports pertinents que la communauté médicale a publiés sur les vaccins, tout en mentionnant les mises en garde relatives aux nouvelles recherches. Avoir des sources fiables et une liste de citations pour soutenir les affirmations aidera à replacer les choses dans leur contexte. "Cela fait partie du développement d'un médicament", conclut Mme Young. Nous devons faire preuve d'humilité quant à ce que nous savons et ce que nous ne savons pas."

Photo du CDC sur Unsplash.

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Inaara Gangji est une journaliste indépendante indo-tanzanienne. Elle écrit sur le genre, la justice sociale et le développement. Mme Gangji est principalement basée à Doha et son travail est paru aux Etats-Unis, au Moyen-Orient et en Afrique.