Pourquoi cette structure brésilienne a créé une boîte à outils de la diversité

4 mai 2023 dans Diversité et inclusion
Diversité

Le laboratoire de journalisme Énois a pour mission de promouvoir la diversité, l'inclusion et la représentation dans les médias brésiliens. Lancé en 2009 sous la forme d'une école de journalisme destinée aux jeunes vivant dans les quartiers défavorisés de São Paulo, le programme s'est ensuite étendu au reste du pays afin de soutenir les efforts de diversité dans le journalisme local.

Lorsque nous avons créé notre boîte à outils de la diversité en 2020, cela faisait plus de 10 ans que nous appliquions et informions des pratiques journalistiques décentralisées, disruptives et axées sur le territoire. Grâce à cette expertise, nous avons mis au point un système permettant de dupliquer nos connaissances dans les rédactions à travers le Brésil.

En diffusant cette feuille de route, d'autres pourront prendre des mesures encore plus importantes pour renforcer le journalisme.

Un moyen de décoloniser le journalisme

J'ai moi-même été étudiante à l'école de journalisme Énois, et en 2018, j'ai suivi un cours avec la journaliste Bianca Santana sur les références noires dans le journalisme, la littérature et l'histoire du Brésil. Cela a complètement changé ma façon de voir la communication. Bien que cette expérience n'ait pas guéri la douleur causée par le manque de représentation dans le journalisme, elle m’a montré qu’une voie que nous pourrions appeler décoloniale existait : une façon de repenser et de rompre avec les pratiques journalistiques traditionnelles (et discutables) qui sont encore en vigueur dans certaines rédactions.

Le cours était provocateur et nous a poussés, moi et d'autres personnes ici à Énois, à sortir de nos zones de confort. Car c'est ainsi que nous fonctionnons : s'efforcer d'améliorer la diversité signifie se confronter à un certain inconfort, qui est nécessaire pour nous aider à nous concentrer sur les objectifs qu'il nous reste à atteindre.

Dès lors, nous nous sommes attachés à dénoncer les perspectives blanches et élitistes qui dominent le journalisme traditionnel. Où sont les reportages où la dimension raciale est prise en compte ? Où sont les Noirs ? Quelle est la couleur de peau et la classe sociale des personnes qui pensent et théorisent le journalisme ?

Comment la boîte à outils sur la diversité fonctionne-t-elle ?

Notre boîte à outils de la diversité incarne la conscience, la personnalité et l'âme d'Énois : un endroit où nous rassemblons des idées pratiques qui rompent avec les pratiques coloniales du journalisme.

Pour que ce projet ait un sens, la boîte à outils devait être gratuite : tout le monde peut y accéder. Il suffit de visiter le site web et de sélectionner l'un des sujets que nous traitons, à savoir l'audience, la culture, la distribution, les équipes, la gestion et les produits.

Comment la boîte à outils est-elle organisée ? Comme un laboratoire qui teste une hypothèse jusqu'à ce que cela aboutisse à un résultat éclairé : nous identifions d'abord les pratiques de nos partenaires, étudiants et formateurs, ainsi que celles de notre propre équipe. Ensuite, nous systématisons les résultats à reproduire et à enseigner dans les formations que nous proposons. Notre dernière étape consiste à ajouter les informations à la boîte à outils. Je suis l'une des membres de l'équipe responsable du suivi et de l'organisation des outils identifiés lors de nos sessions de formation.

Un cas pratique

L'exemple de la journaliste Gessika Costa, qui a participé à plusieurs de nos programmes et qui est actuellement rédactrice à Olhos Jornalismo, nous permet de comprendre les caractéristiques et les applications de la boîte à outils. Lors d'une réunion consacrée à l'Amazonie et aux questions autochtones, nous avons suggéré la création d'une base de données de sources autochtones pour la boîte à outils. Mme Costa a utilisé cette base de données pour rendre compte de la santé des populations autochtones, pour laquelle elle a contacté et interrogé des sources de cette communauté.

"En réfléchissant à la création de la base de données des sources autochtones, j'ai réalisé que nous devions réduire les distances ici à Alagoas", explique Mme Costa. La première étape de la création de la base de données a été de trouver les communautés autochtones d'Alagoas. Elle s'est ensuite adressée à des contacts locaux susceptibles de la mettre en relation avec ces communautés, et a discuté avec des sources au sein de ces groupes qui l'ont aidée à établir d'autres contacts et à effectuer des recherches sur les réseaux sociaux.

La base de données a permis de mettre les communautés autochtones au centre de plus de contenus médiatiques, et s’éloigner des reportages sporadiques, note Mme Costa : "La couverture de l'agenda autochtone doit guider la vie quotidienne des communautés traditionnelles.”

Nous souhaitons que la boîte à outils soit un moyen plus facile de promouvoir la diversité, mais pas de manière superficielle. Dès le début, la diversité doit faire partie de l'équipe, du protocole de la rédaction, du travail des journalistes, pour qu'elle puisse avoir un impact positif sur la couverture de l'actualité. La diversité doit transformer les pratiques et la façon dont les gens voient le monde.

Oui, la diversité est sur toutes les lèvres, et nous devrions profiter de ce moment pour proposer des changements qui transformeront structurellement du secteur du journalisme. Il existe de nombreux moyens d'y parvenir, dont beaucoup sont décrits dans notre boîte à outils.


Image: capture d’écran du site d’Énois Jornalismo.

Cet article a d’abord été publié sur IJNet en portugais.