L'importance du journalisme de paix et comment s'y prendre

25 nov 2021 dans Sujets spécialisés
Une colombe

Lorsqu'ils couvrent des conflits et des crises, les journalistes doivent être conscients des conséquences négatives que leurs reportages peuvent avoir. Toutefois, leur couverture peut être l'occasion de promouvoir la paix dans leurs communautés.

C'est précisément ce que le Center for Global Peace Journalism de l'Université de Park, dans le Missouri, met en avant dans son programme d'études.

"Le journalisme de paix, c'est lorsque les responsables éditoriaux et les journalistes font des choix qui améliorent les perspectives de paix pour le sujet sur lequel ils travaillent", explique le professeur Steven Youngblood, fondateur du centre. "Ces choix, y compris la façon de contextualiser l'histoire et les mots utilisés, créent une atmosphère propice à la paix et soutiennent les initiatives et les artisans de la paix, sans compromettre les principes de base du journalisme de qualité."

M. Youngblood a organisé des séminaires sur le journalisme de paix dans le monde entier, dans des pays comme le Kosovo, le Nigeria et le Yémen. Il tient également un blog sur cette pratique, intitulé Peace Journalism Insights.

Comment les journalistes peuvent-ils aujourd'hui adopter les pratiques du journalisme de paix ? Voici quelques conseils utiles tirés d'une récente formation pour des journalistes en Afrique organisée par M. Youngblood.

[Lire aussi : Reportage en zone de conflits : conseils de journalistes africains]

Être journaliste de paix

Au cours de la formation, Admire Masuku, professeur de journalisme à la Harare Polytechnic School of Journalism and Mass Communication au Zimbabwe, a donné une série de conseils sur le journalisme de paix.

"Lorsqu'ils traitent de la paix, les reporters doivent s'en tenir aux valeurs du journalisme. Ils doivent éviter de faire des morphings, de déformer des photos, de mettre en scène ou de modifier une situation. Les journalistes doivent garantir la pluralité des voix dans leurs reportages et vérifier tous les faits", dit-il, ajoutant qu'ils doivent être impartiaux et saisir une variété de points de vue.

Les journalistes doivent également être attentifs au langage qu'ils utilisent dans leurs reportages et à la manière dont il peut contribuer à la prévention, au fait d'endiguer et à la désescalade des conflits. "Utilisez un langage approprié et évitez les termes manipulateurs et subjectifs. Évitez les préjugés, les discours partisans et intéressez-vous au bien-être des gens. Les journalistes doivent éviter les blasphèmes, les discours haineux [et la désinformation, et] traiter les sources et les sujets comme des êtres humains méritant le respect. Ne traitez jamais les sources comme un moyen pour arriver à vos fins", insiste-t-il.

L'indépendance éditoriale est également essentielle dans le reportage de paix, ajoute M. Masuku : "Agissez de manière indépendante, prenez vos distances des associations qui pourraient compromettre votre indépendance et évitez les influences indues des annonceurs, des [institutions religieuses], des sponsors et des politiciens."

Selon M. Youngblood, il est également impératif que les journalistes comprennent que le reportage sur la paix ne doit pas être réalisé uniquement en période de conflit. Ces principes doivent au contraire être intégrés dans les reportages au quotidien.

Le journalisme de paix en Afrique

La journaliste zimbabwéenne Patience Rusare a participé au lancement de programmes au Rotary Peace Centre de la Makerere University visant à former les journalistes à la rédaction d'articles sur les conflits et à la couverture des différends politiques.

"Les formations évoquent le rôle des médias dans la construction de la paix, la manière dont les pratiques médiatiques peuvent empêcher l'escalade des conflits et promouvoir leur résolution non violente", explique-t-elle. "C'est une riche collection d'expériences et de cas qui racontent habilement les liens historiques entre les médias et la construction de la paix en Afrique et au-delà."

Dans le cadre de ces formations, qui se déroulent au Zimbabwe, au Nigeria et au Liberia, Mme Rusare explore les valeurs fondamentales que sont la vérité, la justice sociale, l'équité et l'équilibre dans le reportage.

[Lire aussi : Un nouveau média couvre les sujets humanitaires au Nigéria et en Afrique de l'Ouest]

Caractéristiques du journalisme de paix

Selon M. Youngblood, le journalisme de paix présente les caractéristiques suivantes :

  • Il est proactif, examinant les causes du conflit. Il cherche des moyens d'encourager le dialogue avant que la violence ne se produise, et explore des solutions.
  • Il reconnaît l'existence d'un terrain d'entente entre les parties et rejette les rapports simplifiés du type "nous contre eux" ou "les bons contre les méchants". Les reporters de paix rejettent la propagande, d'où qu'elle vienne, et recherchent plutôt des faits provenant de sources diverses.
  • Il est impartial, couvrant les problèmes/souffrances/propositions de paix de tous les côtés d'un conflit. Il donne également la parole aux sans-voix, au lieu de faire des reportages pour et sur les élites et les personnes au pouvoir.

Vous trouverez une liste complète de conseils sur le blog Peace Journalism Insights de M. Youngblood.


Photo de Sunguk Kim sur Unsplash.

Lungelo Ndhlovu est un journaliste international primé à plusieurs reprises, basé à Bulawayo, au Zimbabwe. Il se spécialise dans la rédaction, la photographie et la production de vidéos, couvrant les grandes actualités, les reportages et les événements locaux pour divers médias.

Il effectue également des recherches et écrit des articles pour les plateformes numériques et multimédia.