Cette semaine, les élections en Égypte se présentent comme un référendum sur la présidence d'Abdel Fattah el-Sissi, en fonction depuis 2014. Parallèlement, d'autres échéances électorales majeures sont prévues en Afrique du Nord et Moyen-Orient l'année prochaine, notamment en Tunisie et en Algérie.
En 2024, plus de 4 milliards de personnes, représentant la moitié de la population mondiale, participeront à des élections. Pour les journalistes chargés de couvrir ces événements, il est impératif d’avoir une maîtrise optimale des réseaux sociaux. Cette compétence revêt une importance cruciale tant pour informer le public que pour contrer la propagation de la désinformation.
Au cours du Forum médiatique égyptien de 2023, Fadwa Kamal, consultante en gestion de programme à l'ICFJ, et Mais Katt, boursière de la Jim Hoge Fellowship, ont animé des sessions de formation approfondies. Ces sessions portaient sur l'intégration effective des réseaux sociaux, des données et des éléments visuels dans le cadre de la couverture électorale. De plus, les participants ont pu se familiariser avec des outils de vérification des faits utiles, et des discussions approfondies ont eu lieu sur les défis éthiques auxquels les journalistes font face sur les plateformes de réseaux sociaux.
Mme Katt a souligné : "L'évolution du paysage de la couverture électorale pose de nombreux défis aux journalistes, le plus pressant étant la difficulté croissante à capter et à maintenir l'attention du public. Le succès de la couverture électorale dépend d'un équilibre subtil entre la participation du public et l'utilisation des médias. Des données captivantes, des images persuasives et des récits percutants sont des éléments essentiels pour atteindre cette synergie."
Voici ce qu’il fallait retenir de ces sessions :
L'impact des réseaux sociaux sur les élections
Les réseaux sociaux jouent un rôle de plus en plus prépondérant dans la manière dont les individus appréhendent et participent aux élections. Cette transformation a des impacts positifs, tels que l'augmentation de la participation électorale, notamment au sein des jeunes et des communautés marginalisées. De plus, les réseaux sociaux ont renforcé la transparence des campagnes en permettant des mises à jour en temps réel, facilitant ainsi le suivi des campagnes électorales par les journalistes.
Cependant, cette évolution comporte également des aspects négatifs. Les réseaux sociaux facilitent la propagation d’informations fausses ou trompeuses, pouvant éroder la confiance dans les institutions démocratiques à long terme. Ils peuvent également donner lieu à du harcèlement en ligne ciblé et à de la cyberintimidation à l'encontre des candidats, des militants et des journalistes, tout en offrant une opportunité aux acteurs étrangers d'influencer l'opinion publique, par exemple en manipulant la perception d'un candidat.
Par ailleurs, les algorithmes des réseaux sociaux ont tendance à créer des bulles de filtre et des chambres d'écho, exposant principalement les utilisateurs à des contenus en accord avec leurs convictions existantes. "Cela limite leur exposition à des perspectives diverses et renforce les préjugés, contribuant ainsi à une polarisation accrue et entravant la prise de décision éclairée", souligne Mme Kamal. “En réponse à ces défis, les journalistes doivent maîtriser les techniques de vérification des faits et démystifier les informations erronées et la désinformation afin de fournir à leur public des informations exactes et fiables.”
Susciter l'intérêt du public sur les réseaux sociaux
Aujourd'hui, l'information se diffuse de plus en plus à travers les médias sociaux. Bien qu'il n'existe pas de modèle unique pour engager les utilisateurs sur ces plateformes, quelques conseils clés peuvent stimuler l'engagement :
- Diversifier le contenu : Intégrez une variété d'éléments tels que des images, des vidéos, des graphiques, des infographies et des sondages d'opinion pour captiver davantage votre public.
- Répondre aux commentaires : Établissez des politiques claires pour la rédaction sur le moment et la manière de répondre aux commentaires et aux questions sur les réseaux sociaux. Soyez transparent sur les implications, soulignant que bien que répondre régulièrement aux commentaires puisse améliorer l'engagement, cela nécessite également du temps et des ressources.
- Interagir avec votre public : Même si une réponse systématique n'est pas toujours possible, donnez à votre public l'impression d'avoir son mot à dire dans la couverture médiatique par le biais des réseaux sociaux. Suivez les comptes d'utilisateurs, retweetez et partagez les messages de vos followers, et encouragez les discussions sur divers sujets.
- Mettre en place des sessions en direct : Les fonctionnalités telles que Twitter Spaces, Instagram Live et Facebook Live offrent des moyens efficaces de communiquer en temps réel avec votre public et de répondre à ses questions. Cela contribue à impliquer votre audience de manière dynamique et à la faire se sentir plus engagée dans la discussion.
À l'approche des élections, l'application de ces techniques peut aider les médias à maximiser leur impact sur leur audience via les réseaux sociaux. "Nos récits ne se déroulent pas seulement dans les rues et les centres électoraux, mais également sur Internet, où les rivalités entre candidats, les scandales, les violations, les aspirations et les préoccupations des électeurs sont tous omniprésents", souligne Mme Katt.
Prévenir la diffusion de fausses informations et d’informations trompeuses dans le contexte électoral
Les informations inexactes prolifèrent couramment sur les réseaux sociaux. Votre couverture des élections risque souvent de figurer dans les fils d'actualité de vos abonnés à côté de contenus trompeurs. "Les réseaux sociaux constituent un terrain propice à la désinformation et à la création d'informations fallacieuses, du fait de la facilité avec laquelle les informations peuvent être partagées rapidement et de manière étendue", souligne Mme Katt.
Le discours de haine peut être défini comme tout message qui incite à la violence, à la discrimination, aux tensions sociales et politiques, à la diffamation, ou à l'hostilité envers un groupe de personnes particulier sur la base de caractéristiques inhérentes. Il est crucial de faire une distinction significative entre une critique politique ou sociale sévère et un discours de haine, comme le précise Mme Kamal.
Pendant les élections, lorsque les émotions atteignent leur apogée, des discours de haine peuvent être propagés par les campagnes, les candidats et leurs partisans. Les journalistes, engagés dans la lutte contre ces discours, peuvent devenir des cibles dans ces situations tendues.
Pour déterminer si une déclaration donnée relève ou non du discours de haine, Mme Kamal recommande de consulter des organisations de la société civile et des experts ayant une expérience dans l'identification de ces discours. Il est essentiel de lutter contre les discours de haine de manière à ne pas les mettre en valeur par inadvertance ni augmenter leur portée. Comme toujours, la vérification des informations auprès de plusieurs sources avant de les publier demeure cruciale dans ce contexte.
"Couvrir les élections à l'ère des réseaux sociaux est une tâche difficile, mais cruciale", souligne Mme Kamal. "Les journalistes ont la responsabilité fondamentale de fournir au public des informations précises et fiables sur les candidats et les enjeux.”
Ressources pour les journalistes couvrant les élections à venir
L’image principale prise lors du Forum médiatique égyptien