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S'il y a des aspects positifs qu'on pourra retenir de la pandémie de COVID-19 au Togo, l'engagement, la solidarité et le sens du partage tiennent une place de choix. Ceci parce que, certains fils et filles de différents secteurs d'activités, nonobstant difficultés, craintes et incertitudes nées en cette période ont pris sur eux de porter assistance aux autres.
Ambroisine Memede, la très discrète directrice générale de Savoir News, la première agence de presse privée au Togo est l'une d'entre elles. Consciente de l'importance de l'information, et surtout de l'importance de transmettre la bonne information en période de crise sanitaire, malgré les moyens très limités, elle a initié le projet "Femme Média-Vs-Covid-19". L'initiative, portée conjointement avec plusieurs consœurs journalistes avait un objectif majeur : sensibiliser les populations au respect des mesures barrières.
Des compétences au service de la lutte
À la faveur de ce projet, elles sont une trentaine de journalistes, mobilisées sur toute l'étendue du territoire togolais pour porter l'information et sensibiliser sur le "mal du moment". "Il s’agit plutôt d’un mouvement spontané de femmes des médias. J’ai émis l’idée en me basant sur le fait que les meilleures éducatrices selon moi, ce sont les femmes. En tant que mère, elle veillent également à la santé de tous les membres de la maison. Nous sommes des femmes, mais également des communicantes, qui peuvent facilement et efficacement porter les messages de sensibilisation", explique-t-elle.
#FemmeMedia_vs_Covid19 Lutte contre le #Covid19
— Djatougbe Aziaka (@RolandeAziaka) April 9, 2020
Ecouter le message de Ambroisine Mêmèdé,
Directrice de l'agence de presse Savoir News
#SoundCloudhttps://t.co/M15JSMugVW
"Chacune apporte sa compétence : textes, mixage, montage, graphisme, etc… et quand le tout est prêt, on diffuse." De poursuivre : "[...] le journaliste est non seulement un éveilleur de conscience, mais aussi un leader d’opinion. Donc, nous disposons de meilleurs arguments, de meilleurs éléments de langage et la meilleure manière de porter le message pour atteindre la cible."
Des messages disponibles dans plusieurs langues
"Nous avons produit des visuels de sensibilisation sur les gestes barrières, des messages audio... Certains de ces messages sont encore disponibles. Plusieurs ont été véhiculés du nord au sud, dans plusieurs langues : français, éwé, Kabyè, Tchamba, Kotokoli… nos principaux canaux de distribution sont les radios et les réseaux sociaux", précise-t-elle.
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De quoi réveiller les incrédules et les sceptiques : "c’est en écoutant des audio sur WhatsApp, surtout dans ma langue maternelle, que j’ai finalement pris au sérieux l’existence de cette pandémie", confie Mme Deby, tenancière d'une cafétéria à Lomé. "Au début je n’y croyais pas. Mais aujourd’hui, je suis la première qui sensibilise autour de moi, et même dans ma cafétéria les clients ne viennent plus s’asseoir pour manger", affirme-t-elle.
Si selon le classement du Lowy Institute, le Togo est le deuxième pays africain ayant le mieux géré la riposte contre le COVID-19, de telles initiatives, comme l'ensemble de celles qui ont pris corps depuis le mois de mars 2020, y ont joué une part importante.
Yves Galley est directeur de publication du journal La Symphonie. Pour ce dernier, "notre consœur Ambroisine, au-delà de la mobilisation de son média, Savoir news, s'est personnellement investie dans la campagne de sensibilisation à travers son mouvement "Femme Media_vs_Covid19". Avec un sens élevé du patriotisme, elle a usé de son leadership pour rallier à sa cause d'autres consœurs, pour jouer une partition importante dans la prévention du COVID-19."
"Impressionnés par cet engagement désintéressé"
Ce dernier ne cache pas son admiration. "Nous étions tous impressionnés par ce haut degré d'engagement désintéressé. Certains messages émis par son mouvement ont même été exploités comme des jingles d'émissions radiophoniques, les réseaux sociaux, notamment les groupes Whatsapp et Facebook, étaient également envahis par lesdits messages."
Pour Ambroisine Memede, également mère de famille et épouse, au-delà de la situation particulière que crée la crise sanitaire, des couches plus vulnérables de la population sont souvent négligées. C'est le cas des enfants de rue. "Actuellement l’un des points qui nous tient à cœur, c’est la situation des enfants de rue, face à cette crise", affirme-t-elle.
Et de poursuivre, "selon des chiffres obtenus lors d'un reportage sur la question, on dénombre plus de 7 000 enfants de rue (dont 1 800 filles) au Togo et les débuts de la crise n'ont pas été faciles pour eux, notamment le couvre-feu. Personnellement, j'ai réalisé un reportage qui m'a permis de toucher du doigt ce que vivent ces enfants. C'est l'un des milieux où les gestes barrières (notamment la distanciation) sont difficiles à respecter".
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"Aller jusqu'au bout"
Pour la journaliste, il s'agit d'un réel défi à relever. "Le grand défi, aujourd’hui, est de ne pas se lasser et d'aller jusqu’au bout. Nous allons accentuer la sensibilisation : envoyer nos messages dans les groupes Whats’App non-professionnels et autres réseaux sociaux, sur divers aspects de la pandémie."
Limité par l'insuffisance des moyens, le mouvement reconnaît n'avoir pas pu atteindre tous les objectifs qu'il s'était fixés. "C’est vrai que nous n’avons pas pu délivrer autant de messages qu’on aurait souhaité diffuser, nos moyens étant limités. Nous travaillons en comptant sur nos propres moyens et nos compétences pour le moment", déplore la journaliste.
Un appel lancé
Mais comme le soutient Yves Galley, "Ambroisine s'est érigée en un modèle dans le monde féminin de la presse togolaise et sous-régionale, elle a le mérite d'une reconnaissance à la hauteur de sa bataille contre le COVID-19".
Ayant travaillé aux côtés de sa consœur dans le montage des messages, Rolande Aziaka est l'une de ses collaboratrices des premières heures sur le projet. Pour cette dernière, c’est une action assez forte qui a été posée en cette période de crise sanitaire et qui mérite d’être soutenue financièrement. Un appel qu'elle lance, d'autant plus que la pandémie n'a pas encore dit son dernier mot.
Photo d'illustration : Akanksha Srivastav pour Réponse des Nations Unies à la COVID-19, via Unsplash, sous licence CC
Hector Nammangue est un journaliste togolais spécialisé dans l'environnement, il est le créateur de Vert Togo, média traitant des questions environnementales en Afrique.