En avril, je me suis rendue dans la ville historique de Pérouse, en Ombrie, en Italie. Avec son ciel bleu azur, ses glycines suspendues aux anciens remparts romains, ses nombreuses glaces et ses magnifiques panoramas depuis le sommet de la colline, le cadre était vraiment unique. Mais les personnes que j'ai rencontrées lors de ma visite ont été plus inspirantes encore. Pérouse accueille chaque année le festival international du journalisme, un rendez-vous incontournable pour les acteurs des médias du monde entier. Voici mes cinq principaux apprentissages.
(1) Les relations face à face sont irremplaçables
Oui, je comprends l'ironie de prendre l'avion pour parler de journalisme climatique, mais parfois, les rencontres en face à face, les discussions improvisées et les conversations à table sont tout simplement impossibles à reproduire en visioconférence. J'ai rencontré des journalistes de ma cohorte du Réseau de journalisme climatique d'Oxford. Géré par le Reuters Institute, ce programme de six mois s'avère précieux, non seulement pour les séminaires animés par des intervenants de haut niveau, mais aussi pour les collaborations qui se développent au sein du réseau. Apprendre de mes pairs travaillant en Autriche, au Brésil, au Canada et bien au-delà m'a profondément ouvert les yeux sur la diversité des défis auxquels nous sommes tous confrontés – et sur les possibilités créatives qui s'offrent à nous.

Au cours de mes discussions avec mes collègues de mon programme de recherche sur les solutions climatiques pour les leaders des médias européens, venus de France, d’Italie et de République tchèque, j’ai écouté les moments d’illumination que d’autres ont eus et j’ai réfléchi à mes propres progrès – en interne, vis-à-vis de ce que le leadership signifie pour moi et de la manière dont je peux apporter des changements significatifs, mais aussi en externe, en termes de soutien à ma propre équipe et d’encouragement à une plus grande collaboration au sein de cette organisation.
En partageant joies et inquiétudes autour d'une pizza margarita ou d'une boule de nocciola (glace à la noisette – ma préférée), j'ai compris que l'authenticité est la qualité la plus importante. Tout le reste suit, et chacune de ces rencontres authentiques, honnêtes et franches renforce mon appréciation de cette qualité.
(2) Le journalisme environnemental est en plein essor
De nombreux journalistes en début de carrière m'ont contacté, désireux de discuter et d'en savoir plus sur la manière de s'immerger dans cette spécialité. À mes débuts en biologie, je travaillais dans la production télévisuelle animalière et le journalisme de magazine. À l'époque, la couverture environnementale était plutôt marginale, au mieux secondaire. Les journalistes spécialistes du climat étaient rares ; les mentors volontaires étaient difficiles à trouver.

Le paysage a énormément évolué ces 20 dernières années, et je suis fière que ce secteur de notre industrie se développe et s'enrichisse. Aujourd'hui, les gens souhaitent couvrir les sujets liés au climat dans des formats très créatifs, ce qui est stimulant.
(3) La science ne doit pas rester cloisonnée
Avec la désinformation croissante (à la fois dûe à une mauvaise interprétation involontaire et à une mauvaise communication délibérée) en ligne, combinée à un désengagement généralisé des sources d’information grand public, les réseaux sociaux ont un rôle important à jouer dans la manière dont nous nous engageons ou non dans le climat.
J'ai animé un événement avec Adam Levy sur la manière de mettre en avant la science climatique sur les réseaux sociaux. Titulaire d'un doctorat en physique atmosphérique de l'Université d'Oxford, M. Levy travaille désormais comme journaliste scientifique et diffuseur, produisant des vidéos sans jargon technique qui rendent accessibles et concises des questions climatiques complexes.

La communication climatique ne se limite pas à la transmission de faits. Elle laisse une place à la nuance, voire à l'humour. Nous avons discuté de la nécessité de combler le fossé entre science et narration, de l'application d'une approche journalistique rigoureuse à toutes les formes de contenu et de l'importance de l'intégrité comme priorité absolue. Tout cela renforce la confiance et crée des liens.
(4) Le temps presse
Le prochain sommet des Nations Unies sur le climat (COP30) approche et nous nous y préparons. L'une de mes interventions préférées a été celle de Daniel Nardin, autre journaliste spécialisé dans les solutions et membre de l'Oxford Climate Journalism Network. Il vit à Belém, la ville brésilienne qui accueillera la COP30 en novembre, où les négociateurs continueront de débattre des meilleures solutions pour lutter contre le changement climatique et s'y adapter. Mais ces stratégies, cadres et engagements peuvent paraître arides, denses et difficiles à assimiler.
Le média de M. Nardin, Amazonia Vox, donne la parole aux populations vivant en Amazonie, dans les zones forestières, déboisées et urbaines. Il explique que les enjeux environnementaux, sociaux et politiques en Amazonie sont complexes et nuancés, c'est pourquoi il place les voix locales au cœur de son récit.
Rien de tout cela n'est sorcier. Mais M. Nardin s'y attelle activement, car il n'y a pas de temps à perdre.

(5) La culture des salles de rédaction se transforme
The Conversation jouit déjà d'une grande renommée. De nombreux experts en communication, universitaires et lecteurs m'ont confié leur enthousiasme pour notre travail et nos valeurs. Lutter contre la désinformation de manière engageante est notre spécialité. Notre objectif est de vous connecter, vous, notre public et notre communauté, aux connaissances les plus précises et fondées sur des données probantes. Nous comblons déjà le fossé entre la recherche et le monde réel. C'est donc le moment idéal pour évoluer et relever ce nouveau défi.
À l'avenir, The Conversation peut contribuer à changer la façon dont les histoires liées au climat sont racontées. La crise climatique dépasse déjà largement le cadre environnemental. Elle touche tous les aspects de nos vies, de la santé à l'éducation, en passant par l’économie et la démocratie, sans oublier les conflits et la culture. Les rédactions n'ont plus besoin de fonctionner comme elles le font depuis des décennies. En faisant appel à notre curiosité journalistique, nous pouvons expérimenter et réinventer la norme.
Au New York Times, l'équipe climat est physiquement au cœur du bureau. À l'Agence France-Presse, des intitulés de poste tels que « Rédacteur en chef, Avenir de la planète » reflètent de grandes ambitions d'intégration du climat à tous les niveaux. À la CBC, le radiodiffuseur public canadien, l'unité science et climat a fait de la formation à la connaissance du climat une priorité absolue pour l'ensemble du personnel, non pas par intérêt, mais parce que la pérennité est une valeur ajoutée pour l'entreprise.
Comme l'a déclaré Mark Hertsgard, directeur exécutif de Covering Climate Now, une communauté médiatique basée aux États-Unis : “Chaque journaliste du 21e siècle devra être un journaliste climatique.”
Mon travail consiste désormais à traduire l'inspiration de Pérouse en action. Suivez-nous.
Photo de Mauro Grazzi sur Unsplash.
Remarque : Daniel Nardin est lauréat du programme Knight de l'ICFJ.
Cet article a été initialement publié par The Conversation et republié sur IJNet avec autorisation.