"Au Maroc, tout le monde veut faire du podcast"

18 mars 2022 dans Bases du journalisme
Un smartphone, un casque

Il y a un an exactement, du 7 au 9 mars 2021, se tenait en ligne le premier festival du podcast en Égypte, Podfest Cairo. Keynotes, panels ou encore séances de pitchs se sont succédé tout au long de ces deux journées. 

Selon une étude publiée en février 2020 par les organisateurs, qui concerne une soixantaine de podcasteurs égyptiens, les thèmes principaux abordés dans les podcasts se situent en général autour du sport, la santé, le business, la tech et les tabous de la société. Le Caire, Alexandrie, Luxor, Damietta, Mansoura sont les principales villes où sont basés les podcasteurs égyptiens. 

Des projets souvent développés sur fonds propres

En Égypte, l'écosystème du podcast a explosé et connu un pic entre 2018 et 2019. Aujourd'hui, pour ces passionnés du son, il s’agit d’explorer un nouveau mode d’expression pour le plaisir, améliorer leur image de marque, éduquer la population et gagner de l’argent si cela est possible car il s’agit pour la plupart de projets développés sur fonds propres.

Fait intéressant sur le marché égyptien, Soundcloud et Youtube sont les principales plateformes de diffusion des podcasts. Alors que Spotify et Apple Podcasts sont populaires aux États-Unis et en Europe.

Si le marché est encore en pleine structuration, il intéresse déjà des studios de podcasts importants au Moyen Orient comme le studio Sowt en Jordanie qui était représenté au Podfest Cairo. La plateforme Sowt ("voix" en français) a été lancée en 2017. Depuis, elle a diffusé un éventail de podcasts qui traitent de questions allant de la politique à la musique.

À côté et toujours au Moyen-Orient, Hebah Fisher, présidente du réseau de podcasts Kerning Cultures, fondé à Dubaï et premier à avoir reçu des financements privés, est convaincue que ce format représente l'avenir des médias.

"Notre tour de table (qui a permis une levée de fonds de 460 000 dollars) est un signal fort pour l'industrie du podcast au Moyen-Orient : le média est pris au sérieux et sa valeur pour les auditeurs et les utilisateurs est claire", répondait Hebah à l’AFP en 2019.

Près de l’Egypte, le podcast se développe aussi au Maroc avec le studio Les bonnes ondes. Lancé le 15 mars 2021, lesbonnesondes.ma est un média en ligne qui propose une série de programmes allant du reportage, au documentaire en passant par le talk-show. “Un espace de liberté qui donne la parole aux créateurs et journalistes en manque d'expression. Notre ligne éditoriale est centrée sur la bienveillance et l'humain, en effet nous souhaitons répondre aux questions de société à travers le prisme de l'humain.” lit-on sur leur site. 

Raconter des histoires de manière universelle

"Ce qui compte c'est le projet, l'histoire et peu importe la langue. Nous ne visons pas un public spécifique", dit Mehdi El Kindi, fondateur du studio. On trouve donc sur Les bonnes ondes des podcasts en français, anglais, darija (arabe marocain) et bientôt en amazighe

"L'idée était de créer une structure où je pourrais inviter mes amis auteurs et créatifs à venir travailler sur la production sonore. Ça fait 10 ans que je fais de la radio au Maroc et lors d'un voyage au Mali, j'ai réalisé le premier documentaire produit par Les bonnes ondes", nous a expliqué Mehdi. Le podcast Thérapie(s) par exemple, est ouvert à toutes personnes désireuses de raconter une expérience cathartique. "Au Maroc, on a souvent du mal à parler de sentiments et d'émotions." justifie Mehdi.

Dans l'écosystème du podcast, le modèle économique reste un élément central pour les producteurs. Du côté des Bonnes ondes, les collaborations institutionnelles et rémunérées réalisées par l'agence adossée au studio, permettent de financer le travail des autrices et illustratrices qui travaillent sur les podcasts originaux.

Au Maroc, le marché du podcast est en pleine explosion

"(Le podcast), c'est un peu le "buzzword" du moment. Tout le monde veut faire du podcast. Des fois pas à bon escient. Très souvent les gens viennent parler de forme plutôt que de contenu. En tout cas, il y a de plus en plus de podcasts comme Machi rojola, sur les masculinités et ceux de la Radio Maarif sur l'histoire. Et beaucoup de podcasts de communication d’entreprise", ajoute Mehdi.

Et cet engouement ne va pas décroître. Le studio Les bonnes ondes travaille sur un podcast pour montrer les difficultés inhérentes à l'organisation d'événements culturels au Maroc et sur deux séries documentaires qui attendent encore d'être financées.

Avec la structure Making Waves basée en France et l'Institut français du Maroc, le studio prévoit également d'accompagner, suite à un appel à candidatures lancé il y a quelques semaines, la réalisation de six projets documentaires.


Photo sous licence CC via Unsplash, Aaron Burden