"Si un média veut conserver ses meilleurs journalistes, il faut qu'il puisse les payer."

31 août 2023 dans Lutte contre la désinformation
Une femme tape sur son ordinateur, en arrière plan, une boisson chaude et un bloc-note avec un stylo

Dans un contexte sociopolitique, économique de forts défis sur fond d’importantes mutations dans les médias que ce soit sur le plan éditorial, budgétaire, managérial, etc., et qui exige des dépenses énormes, il convient de prendre conscience de l’apport important des organisations de développement médias. 

C’est dans cette logique que le Forum francophone Pamela Howard de l’ICFJ sur le Reportage des Crises Mondiales, toujours soucieux de la quiétude des médias, a organisé deux séries de webinaires axés autour du thème "Journalistes et médias : comment bénéficier du soutien des organisations ?"

Le second webinaire sur la thématique a eu lieu le 3 août 2023. Le modérateur Kossi Balao a reçu Jocelyn Grange. Il est le directeur pour l'Afrique de l’Agence française de développement médias, CFI, dont le champ d’action est l’Afrique, le monde arabe et l’Asie du sud-est. 

"Notre objectif principal, qui l'emporte sur tous les autres, mais qui est assez classique d'un opérateur de développement média, c'est d'aider les secteurs médiatiques des pays dans lesquels on intervient à être des contre-pouvoirs efficaces dans un système démocratique", a souligné Jocelyn Grange. 

Il a partagé avec les journalistes quelques conseils utiles afin de les aider à bénéficier du soutien des organisations, notamment celui du CFI. 

 

Des partenaires de développement médias 

Du 11 au 13 juillet 2023, 300 journalistes et activistes de l’information se sont réunis à Paris. C’est à l’occasion du forum Métiers et Développement porté par CFI. "C’est un forum d'un certain type qu'on organise une fois tous les quatre ans", a indiqué Jocelyn Grange.

À la question de savoir quels sont les critères de sélection pour les journalistes qui souhaitent participer dans l’avenir à ce forum, le directeur Afrique de CFI répond : "C'est plus une sélection qu'on fait en interne […] On est plutôt sur des gens dont on dira qu'ils font partie du premier cercle de la communauté. Ils peuvent être des partenaires au développement."

Il a cité en exemple la Media Foundation for West Africa (MFWA) ou encore Africa Check. Des organisations "avec lesquelles on travaille beaucoup, des gens avec qui on met en œuvre des projets, des personnes expertes aussi qui travaillent régulièrement avec nous […] C'est ces gens-là aussi qu'on a privilégiés pour le forum", a souligné l’invité de Kossi Balao. 

Postuler à des appels à candidatures

En outre, l’Agence française de développement médias met en œuvre plusieurs autres projets. Les participants sont sélectionnés suite à des appels à candidatures.  

"C'est en général les médias qui ont candidaté [...] et qui ont été acceptés [...], qui vont participer à ces projets. Donc un appel à candidatures, c'est au début du projet. On est sous la logique de projet structurant, c'est-à-dire deux ans, trois ans, quatre ans, voire cinq ans", a dit l’ancien journaliste de RFI. 

Il a aussi expliqué que CFI travaille toujours avec des partenaires africains.  

Pour avoir dirigé au cours de la dernière décennie plusieurs programmes de renforcement des médias en Afrique avec l’Union européenne et des opérateurs de développement anglo-saxons, Jocelyn Grange ajoute un détail aussi important. 

"On inclut toujours aussi le management des médias, parce qu'on a bien conscience qu'en Afrique comme ailleurs, l'argent est quand même le nerf de la guerre pour un média. S'il veut conserver ses meilleurs journalistes, il faut qu'il puisse les payer."

Avoir un bon profil

Il ne suffit seulement pas de postuler à des appels à candidatures, le profil du média candidat joue aussi lors de la sélection des dossiers retenus. 

"On travaille aussi sur la technique des personnes avec leur CV, pour voir si le CV [...] est aussi en adéquation avec les objectifs du renforcement des capacités", insiste l’invité du directeur du Forum francophone de l’ICFJ. 

À cela, s’ajoute la présentation "du modèle de viabilité économique du média candidat", relève Jocelyn Grange. Puis d’ajouter : "Même s'il n'est pas totalement abouti, il faut quand même qu'on sente qu'il y a une réflexion là-dessus. On est un opérateur de développement média. Dans le développement média, il y a média, mais il y a aussi développement."

Il a surtout précisé que CFI propose"deux types d’appui financier". Notamment, "un appui financier aux médias et un appui financier individuel à des journalistes qui font partie des médias sélectionnés […] à travers des petites bourses de journalisme pour les aider dans la réalisation d'une enquête", a-t-il expliqué. 

Le Directeur Afrique de CFI a souligné qu’ils ont cinq thématiques d’intervention prioritaires qui sont : la gouvernance démocratique, la stabilisation des zones de crise, la lutte contre la désinformation, l'égalité hommes-femmes et la lutte contre le changement climatique. 


Photo : Daniel Thomas via Unsplash