Chaque semaine, le Forum de Reportage sur la Crise Sanitaire Mondiale lancé par le Centre international pour les journalistes (ICFJ) organise des rencontres en ligne qui visent à aider les journalistes dans leur couverture de la pandémie de COVID-19. N'hésitez pas à le rejoindre.
Quelles pratiques pour faire avancer la carrière des journalistes francophones ? Comment collaborer en s’inspirant du modèle anglophone ? Comment profiter d’un réseau ?
Ces questions ont fait l’objet d’un café virtuel qui a réuni des journalistes francophones du Forum de Reportage sur la Crise Sanitaire Mondiale, une initiative du Centre International pour les Journalistes basé à Washington, lancé en partenariat avec le Réseau International des Journalistes (IJNet). Ce café virtuel a rassemblé des confrères du Togo, du Bénin, de la République démocratique du Congo, d’Haïti, de la Côte d'Ivoire, du Cameroun et du Burundi.
S’associer autour d’un projet d’intérêt
Ces professionnels des médias ont partagé leurs expériences de collaboration avec des confrères étrangers sur des projets de reportages transfrontaliers. Evoquant son expérience, Yves Polepole, journaliste congolais, informe avoir un projet en cours dans lequel il est impliqué. C’est un projet, dit-il, qui s’ouvre aux pays tels que le Rwanda, le Burundi.
Il s’agit, selon lui, d'un projet qui inclue des articles de correspondants chaque week-end "pour faire le point de l’actualité". "Le projet vise la RDC, les provinces qui sont entre le Rwanda et le Burundi. Il est implémenté par 18 journalistes correspondants. Les informations recueillies, suite à la collecte sont diffusées dans une quarantaine de radio".
Une journaliste de la RDC, pour sa part, informe avoir mis en place un média en ligne avec des confrères du Bénin, Cameroun, Rwanda et RDC, grâce "à l’existence du Forum de Reportage sur la Crise Sanitaire Mondiale".
Difficultés à collaborer entre confrères francophones
Par ailleurs, Edith Valérie, journaliste de presse écrite et communicatrice événementielle, soutien qu’en Afrique francophone, il existe des "soucis d’égo, on n’a pas souvent, dit-elle, le soin de s’associer pour pouvoir produire quelque chose, parce que dans notre milieu, chacun essaie de tirer la couverture à soi."
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Edith Valérie, partageant son souhait de collaborer avec des confrères dans le domaine du cinéma, dit s'être heurtée à des difficultés. "Moi, j’ai essayé de faire cet exercice de journalisme collaboratif il y a de cela deux ou trois ans. C’était dans le domaine du cinéma et de la culture, au sein d'une plateforme où l'on partage l’expérience cinématographique. Je faisais des dossiers toutes les deux semaines dans le journal où j’exerçais, mais vraiment ça n’a pas prospéré, parce qu’à un moment donné, ils se disent peut-être que tu profites des autres [...]. On est toujours en train de dire tel est en train de profiter de l’autre, du coup, ça devient un peu compliqué de travailler dans cette synergie", a-t-elle argumenté.
Pascal Ndayisenga, journaliste burundais n’en dit pas moins. Pour lui, en Afrique francophone, les journalistes sont confrontés à ce "défaut" de collaboration. "Nous sommes disposés au Burundi à travailler avec nos confrères du Rwanda, de la Tanzanie et de RDC et tous les autres, mais il y a le problème d’être en contact", soutient-t-il.
Un manque de connexion ?
"[...] C’est possible de toujours collaborer, de s’unir, travailler sur un sujet, partager des expériences pour informer autrement le monde", propose pour sa part Patient Lukusa, journaliste, ajoutant qu’il a l’habitude de collaborer avec des journalistes du continent.
Outre cela, pour Milo Milfort, journaliste d’investigation en Haïti, c’est l’absence de réseautage qui justifie le défaut de collaboration entre les journalistes francophones. "Je pense qu’il manque une certaine connexion, un réseautage entre les journalistes. J’ai remarqué qu’en Afrique anglophone, il y a une bonne collaboration entre les journalistes et il y a comme des avancées intéressantes à ce niveau-là", soutient-il. Il a par ailleurs salué l’initiative du forum de reportage qui, dit-il, permet de mettre en réseau les journalistes francophones.
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Revenant sur le réseautage, Gloria Mpanga pense qu’il reste encore à faire en Afrique francophone. Yves Polepole voit plus loin le facteur d’entrave à la collaboration entre les journalistes francophones. De son avis, il faut questionner avant tout la collaboration entre les pays africains francophones. En Afrique francophone, soutient-il, il y a déjà un bloc créé au sein de la CEDEAO. C’est aussi lié à la tradition d’appui reçu des grands médias francophones qui sont "très différents de ce qui se fait chez les anglophones".
Défis à relever
Amener les journalistes à collaborer sur des projets journalistiques est peut-être un défi que le Forum de Reportage sur la Crise Sanitaire Mondiale va relever, pense Pascal Ndayisenga, journaliste burundais, qui loue par ailleurs l’initiative de la mise en place du forum. Un autre défi évoqué lors de cette conférence virtuelle, est relative à l’initiation d’un ou deux sujets de reportages collaboratifs.
En termes de perspectives, les confrères ont échangé sur la possibilité, pour eux, de faire un travail journalistique sur le coût de la prise en charge des personnes atteintes du coronavirus, les défis des Etats africains face à la vaccination, également de creuser sur les préjugés des uns et des autres sur les vaccins contre le COVID-19.
Patient Lukusa de RDC, va plus loin en suggérant la création d’un groupe WhatsApp qui, selui lui, va déjà réunir les participants de ce webinaire pour commencer de poser les bases d’un journalisme collaboratif entre journalistes francophones d’Afrique.
Journaliste de nationalité béninoise, Giraud Kuessi Togbé est titulaire d'une licence en Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication au Bénin. Il renforce depuis quelques années ses capacités en journalisme multimédia au Centre d'Etude des Sciences et Techniques de l'Information (CESTI) Dakar au Sénégal.
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