La renaissance de France-Antilles passera (aussi) par le numérique

نوشته Florent Servia
Sep 18, 2020 در Infos locales
Un homme courant sur la plage

Le quotidien historique des Antilles françaises connaît une année 2020 mouvementée. Liquidé fin janvier avant d’être racheté, France-Antilles doit rebondir malgré le coronavirus et ses effets néfastes sur l’économie. 

Avec sa liquidation, en janvier, France-Antilles laissait les territoires de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane sans presse quotidienne régionale. Le journal, vieux de 50 ans, était en redressement judiciaire depuis l’été 2019, avec la nécessité de combler des pertes financières importantes. Finalement repris par Xavier Niel, fondateur de Free et patron de presse (le groupe Le Monde, Mediawan), France-Antilles a repris ses activités en numérique au mois d’avril, avant de relancer l’impression du journal en Guadeloupe et en Martinique, le 17 juin. De 235 salariés avant sa liquidation, France-Antilles en compte désormais 125. Le Réseau international des journalistes fait un point d’étape avec Nathalie Dinane, rédactrice en chef par intérim, sur la situation du journal.

IJNet : Qu’en est-il de l’avenir du journal, aujourd’hui ? 

Le groupe Niel, le président du directoire et notre directeur régional sont déterminés à rester longtemps. Ce qui veut dire qu’ils vont tout faire pour que le journal s’en sorte et qu’il perdure. C’est leur projet et ils n’en démordent pas. 

Mais il va falloir attendre la fin de l’année pour dresser un bilan de la reprise. On constate déjà que les revenus publicitaires ne sont pas florissants, puisque de toute façon, avec la crise du COVID-19, tout le monde en pâtit, ici comme dans l’Hexagone. 

Y a-t-il un regain des ventes depuis la reprise ? 

Les chiffres repartent sensiblement. Chaque semaine, les ventes augmentent de plusieurs centaines. Au fur et à mesure, doucement, mais sûrement, on monte en puissance. On sent qu’il y a eu une prise de conscience. 

A combien d’exemplaires tirez-vous le journal actuellement ? 

Nous sommes à environ 25 000 exemplaires pour l’édition du week-end, et à 10 ou 12 000 sur le quotidien, en Guadeloupe. Les tirages sont similaires en Martinique. En Guyane, l’édition papier n’a pas encore repris. 

Quelques centaines de milliers de personnes suivent les activités du titre sur les réseaux sociaux. Envisagez-vous de développer les abonnements numériques ? 

Le digital va être le centre de tout, puisque c’est l’avenir. Là, pour l’instant, la direction rencontre les responsables du digital et la rédaction web pour voir comment faire évoluer le site, les réseaux sociaux et notre approche de l’information sur ce média. On essaye d’écrire les projets pour les présenter d’ici plusieurs semaines, afin d’acter de nouvelles initiatives. 

Le Parisien souhaite atteindre 100 000 abonnés numériques. Le Monde, 1 million. Quel objectif vise France-Antilles

Non, nous n’en avons pas encore discuté. Notre directeur régional vient de prendre ses fonctions au 1er septembre. Nous avons seulement repris il y a quelques mois. Nous n’avons pas encore cette perspective. D’ici le 1er novembre, le nouveau directeur régional viendra vers nous pour nous présenter son projet. Pour le moment il rencontre tous les chefs de service afin de faire remonter les informations. 

France-Antilles a besoin de vendre des abonnements et des numéros. Quelles sont les attentes de la population ? 

On avait fait une étude un an avant de disparaître. Ils souhaitaient plus de photos et encore plus de proximité. Par exemple, si vous avez un trou dans la rue, devant chez vous, vous voulez savoir à qui vous adresser, pourquoi il y a encore ce trou et dans combien de temps il va disparaître. Pendant les élections, il est attendu que le journal diffuse les listes des candidats. C’est considéré comme un indispensable. Ce type de demandes nous fait penser qu’on a encore de beaux jours devant nous, parce que la presse quotidienne régionale joue un rôle. 

Avez-vous ressenti leur soutien à la disparition du journal, en janvier ? 

On les avait déjà alertés depuis deux mois pour leur signifier que nous étions en grande difficulté. Et comme le journal existe depuis 50 ans, ils estiment presque que c’est une institution et qu’il ne peut pas disparaître. Alors que c’est quand même une entreprise privée et qu’à ce titre, si on ne vend pas de journaux, on a des soucis. 

Quand on a disparu, les gens se sont rendus compte que sans France-Antilles, il n’y avait plus de journal dans les tabac presse, dans les stations services… Et là il y a eu une vague de témoignages, de messages de tristesse... Un département, une région sans journal, ce n’est pas possible. Mais c’était fait. On a senti quand même que les gens attendaient notre retour, et qu’ils achèteraient davantage. Nous sommes encore dans cette montée en puissance. 


Photo sous licence CC par Cyril Mazarin via Unsplash