Chaque semaine, le Forum de reportage sur la crise sanitaire mondiale vous propose des webinaires, ateliers ou rencontres en ligne, accessibles à tous les journalistes francophones.
Cette crise sanitaire du COVID-19 a changé la façon de travailler des journalistes partout dans le monde. Face au nombre très élevé de morts, les journalistes n’ont pas arrêté de jouer leur rôle de former et d’informer le public sur l’évolution de la maladie.
Dans ce contexte, le Réseau International des Journalistes a organisé un concours de reportage sur la crise sanitaire en vue de récompenser les huit meilleurs. Lancé le 4 septembre dernier, le concours francophone a reçu au total 138 articles.
Les trois premiers lauréats de la compétition dans la catégorie Sciences et santé ont partagé leur expérience lors du webinaire organisé le jeudi 12 février.
Le premier prix revient à aux journalistes Thomas Bourgeois-Muller et Mégane Chiecchi, respectivement rédacteur en chef adjoint du pôle multimédia et journaliste vidéo au Point. Le deuxième est décerné à Rouguyata Sall, journaliste pigiste, notamment chez Mediapart. La journaliste d’investigation chez Enquet’Action, Dougenie Michelle Archille a quant à elle remporté le troisième prix de ce concours.
Tous les reportages ont été réalisés dans une situation sanitaire difficile, notamment celle des hôpitaux débordés. Le premier prix, le reportage COVID-19 : au cœur de l'Alsace, région meurtrie a pour cadre la région Grand-Est en France, très durement touchée lors de la première vague au printemps 2020. "Ce reportage reste une bonne trace de ce qu'a traversé la région à ce moment-là", explique Thomas Bourgeois-Muller.
L'article de Rouguyata Sall portait quant à lui sur les Ehpad en France. "L'idée de ce papier était de recueillir les paroles des proches des résidents". Pas toujours facile d'avoir les autorisations d'accéder aux sites et d'interviewer les directions des établissements. Les associations de famille de résidents lui ont permis d'avoir accès à la parole de ces proches, alors coupés du contact physique avec leur parent en résidence.
"[...] Mon papier a, à quelque sorte, rappelé que ce sont les personnes de troisième âge qui étaient les victimes de premier rang" a indiqué Mme Rouguyata Sall, gagnante du second prix.
Dougenie Michelle Archille vit à Haïti, un pays bouleversé par la crise socio-politique. Cette journaliste d’investigation croit fermement à l'idée que le journalisme doit être utile à la société. Avec l’avènement du COVID-19, cette jeune reporter a écrit son article sur la question de l’insécurité alimentaire à l’heure de la pandémie. Son objectif, alerter sur l’impact que pourrait avoir la pandémie sur l’alimentation de la population haïtienne.
Des reportages réalisés dans un contexte dramatique
"Le travail était tellement différent de celui que l'on fait d’habitude. C’était difficile de réaliser ce reportage parce qu’on parlait de mort chaque jour" souligne Mégane Chiecchi. Les lauréats ont soulevé les difficultés d’accéder aux sources. Le travail de journaliste a été bouleversé par cette crise sanitaire.
"Le GHR (Groupe hospitalier de la région de Mulhouse et Sud-Alsace) a décliné nos demandes d’interviews. Certains médecins étaient prêts à nous parler, mais ils ne pouvaient pas le faire sans l'aval de leurs directeurs. Des hôpitaux ont verrouillé la communication. Ils ne voulaient pas que ce qui se passe à l’intérieur des structures sanitaires soit à la portée du public", indique Thomas Bourgeois-Muller.
"La crise sanitaire m’a appris beaucoup de choses. En tant que journaliste, elle nous a poussés à changer de méthodologie de travail, parce que sur terrain nous devions aussi nous protéger contre le virus", explique Rouguyata Sall.
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"La situation n’est plus critique aujourd’hui comme c’était le cas en mars et mai 2020" fait savoir Mégane Chiecchi.
Les journalistes se sont lancés sur le terrain sans ignorer le potentiel risque sanitaire qu’ils couraient. "C’est un reportage qui était nécessaire d’être tourné, d’être vu", indique Thomas Bourgeois-Muller.
"Les journalistes doivent s’intéresser aux personnes les plus vulnérables au COVID-19", conseille la journaliste Rouguyata Sall, gagnante du deuxième prix.
"Ce prix constitue une alerte pour moi, il me rappelle ma responsabilité en tant que journaliste. Il me fait comprendre que je dois continuer et fournir beaucoup d’efforts, parce que la société a besoin de mon travail. Je demande aux journalistes de s’intéresser aux sujets relatifs à la vie sociale. Pendant cette période de crise sanitaire, les journalistes doivent être préparés à tout ce qui peut leur arriver", conclut Dougenie Michelle Archille.
Retrouvez ici l'ensemble des lauréats dans cinq langues de l'ICFJ.
Photo d'illustration, sous licence CC Free To Use Sounds via Unsplash
Denise KAVIRA KYALWAHI est journaliste à Butembo, en République Démocratique du Congo. Elle travaille notamment pour Léo Njo Léo TV, un média en ligne pour les Congolais de la diaspora.