COVID-19 : la presse camerounaise retrouve peu à peu son équilibre

بواسطة Jean Charles Biyo’o Ella
Apr 16, 2021 في Couvrir le COVID-19
Dans les rues de Yaoundé, Cameroun

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Sans doute la presse est l’un des secteurs qui a été le plus touché par la pandémie de COVID-19. La crise sanitaire a fait à ce jour au Cameroun plus de 900 morts et près de 62 000 cas positifs enregistrés (source : Université Johns Hopkins). Nonobstant la turbulence économique créée par cette pandémie, les médias camerounais ont décidé de sortir la tête de l’eau. Mais comment réussissent-ils ?

"C’est un vrai désastre qu’a connu malheureusement la presse camerounaise". C’est en ces mots que François Mbocke, le président du Réseau des patrons de presse du Cameroun, résume la situation du quatrième pouvoir durant l’année 2020, secouée par la pandémie à coronavirus.

Mais les médias en tant qu’entreprises ne pouvaient pas demeurer la tête sous l’eau, "nous avons saisi tout de suite les autorités gouvernementales pour que celles-ci apportent aux médias un appui exceptionnel, qui pourrait être soit financier ou matériel, question pour nous de supporter quelques charges dues aux entreprises de presse. Nous avons demandé que l’Etat suspende par exemple quelques impôts liés à nos activités, mais cela n’a vraiment pas été le cas, ou, pas comme nous l’espérions. Chaque patron de presse a donc développé ses équations personnelles, et activé des réseaux qui lui étaient propres pour tenir le coup", assure le président du Repac, par ailleurs directeur de publication du journal Diapason. "Nous avons puisé dans nos réserves personnelles, pour pouvoir imprimer les journaux". 

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Toutefois, Pour retrouver ce semblant d’équilibre qu’on peut constater aujourd’hui, confesse encore François Mbocke "plusieurs patrons de presse de se sont retrouvés dans une situation difficile : celle de mettre en congé technique une partie du personnel et de ne rester qu’avec une poignée de personnes véritablement indispensables.

Licenciements 

Ces "limogeages" plutôt techniques, ont fait certes, du mal à plusieurs familles, car mettent au chômage ceux qui apportaient au quotidien un bout de pain à la maison, mais il faut dire qu’ils ont permis visiblement aux entreprises de faire des économies et de ne pas disparaître totalement. 

De la presse écrite à la radio en passant par la télévision, aucun média n’a été épargné par le séisme économique de la pandémie. En 2020, la situation sanitaire du Cameroun a poussé la chaîne de télévision privée Canal2 International à revoir à la baisse les effectifs de son personnel, en mettant au chômage technique 71 employés constitués des journalistes, animateurs, cameramen entre autres.

Une situation que le SNJC, le Syndicat national des journalistes du Cameroun n’avait pas manqué de dénoncer, en annonçant dans la foulée, des licenciements abusifs au sein de cette entreprise médiatique. Aujourd’hui, certains de ces employés mis en congés ont été rappelés, et d’autres non.

Au Cameroun, la presse est l’un des secteurs qui a le plus subi l’impact économique du coronavirus. Et du coup, elle a vécu et relayé elle-même sa propre descente aux enfers. Entre baisse drastique des ventes en kiosques, rupture des abonnements, arrêt brusque des contrats publicitaires, baisse des salaires des employés, suppression des frais de reportages, le ciel s’est abattu sur le quatrième pouvoir. 

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Aujourd’hui, "contrairement à l’année dernière où le temps était plus à la panique, je peux vous avouer que mon journal retrouve peu à peu son équilibre", lance Fabrice Assoum, le directeur de publication de l’hebdomadaire Panel hebdo. "Vous me demanderez, comment je réussis à retrouver cet équilibre alors que le coronavirus n’est pas terminé ? En fait, c’est tout simplement, un problème stratégique", rassure-t-il. 

Aide de l’Etat à la presse privée

Depuis plusieurs années, l’Etat camerounais met chaque année à la disposition des médias privés, un fond jadis appelé "Aide Publique à la Communication Privée", devenu depuis 2020 "Appui Institutionnel". Cette enveloppe varie entre 240 et 300 millions de fcfa. Une centaine d’entreprises de presse reçoivent une aide en fonction de leur taille.

Toutefois, il faut dire que cet appui gouvernemental n’est pas toujours suffisant pour couvrir les charges essentielles dans la production d’un journal, pour un pays qui enregistre environ 300 tabloïdes, une centaine de radios FM et une trentaine de chaînes de télévision.

Pour des patrons de presse, l’Etat camerounais devrait encore faire davantage pour permettre aux médias de se relever véritablement, après une année sombre liée au choc créé par la pandémie à coronavirus.


Jean Charles Biyo’o Ella est journaliste à Yaoundé pour la radio Tiemeni Siantou.

Photo Edouard TAMBA sous licence CC via Unsplash