Les coulisses des reportages lauréats du concours Covering COVID #2

Feb 26, 2021 em Couvrir le COVID-19
2021

Chaque semaine, le Forum de reportage sur la crise sanitaire mondiale vous accompagne dans la couverture de cette pandémie. N'hésitez pas à le rejoindre. Sur IJNet en français, retrouvez une rubrique dédiée à la crise sanitaire. 

Ils sont lauréats du concours de reportage sur le COVID-19. Une compétition du Centre international pour les journalistes (ICFJ), l'organisation-mère d'IJNet. 

Lancée le 4 septembre dernier, en cinq langues, les organisateurs ont reçu au total (toutes langues confondues) 672 candidatures. Pour la partie francophone, les journalistes Hervé Mukulu et Fousséni Saibou, se sont distingués dans l’une des trois catégories du concours, celle de l’Inégalité, économie et finance.

Au cours du webinaire organisé le jeudi 18 février par le Forum de Reportage sur la Crise Sanitaire Mondiale et modéré par le journaliste Aimable Twahirwa, ces deux lauréats ont partagé leurs expériences, leurs parcours et livré leurs secrets pour espérer remporter des compétitions journalistiques.

Comment trouver son idée de reportage 

Hervé Mukulu, journaliste congolais et scénariste, spécialisé dans le reportage en lien avec l’environnement et la santé depuis une dizaine d’années, raconte que son idée de sujet sur la gestion controversée des sources d’eau potables aménagées par les humanitaires en ville de Butembo qui a remporté le premier prix "est parti d’une conversation à la radio avec un confrère qui se lamentait des frais d'accès d’eau potable en cette période de pandémie du COVID-19 mais aussi d’Ebola."

Des frais sont exigés auprès des ménages pour leurs accessibilités aux sources d’eau potables. D'après Hervé, ’’payer 1 dollar par ménage n’est pas trop, mais quand on constate que 100 à 1 000 ménages utilisent cette source et payent, cela représente un pactole surtout qu’on ignore comment est géré cet argent”. 

[Lire aussi : Les coulisses des reportages du concours Covering COVID]

 

Il constate aussi : "cette situation n’inquiète en rien les gestionnaires, qui se contentent plutôt de changer de comité dès que la population essaye de se plaindre. C'est là que je me suis posé des questions pour savoir ce qui se passait.’’

Un témoignage déclenche une idée 

Journaliste plusieurs fois primé, reporter et présentateur, Fousseni Saibou, lauréat du troisième prix, s’exprime en ces termes : “l'idée de mon reportage est née d'une rencontre initiée par une organisation syndicale pour sensibiliser et offrir du matériel de protection à l'ensemble de ses membres. Un petit fond spécial a été prévu pour les travailleuses domestiques licenciées à cause du COVID-19. J'ai été touché par le témoignage de cette dame lors de cette séance et j'ai décidé d'investiguer.”

Plusieurs d’entre elles ont été licenciées sans préavis faute de moyens de leurs patrons ou par peur qu’elles les contaminent, plongeant ces employées dans une pauvreté extrême. “Imaginez une veuve et ses enfants, se retrouver du jour au lendemain sans emploi” renchérit-il.

Secret de la réussite

Hervé Mukulu et Fousseni Saibou s’accordent à dire qu’il faut de la passion pour réussir dans ce métier, donner le meilleur de soi sans rien attendre en retour. Bien se documenter, interviewer tous les acteurs sont les points-clefs selon Fousseni Saibou. Hervé Mukulu ajoute qu’il faut avoir le sens du détail, “la différence d'un reportage à un autre se trouve dans les détails, la recherche de ce qu'il y a derrière. Je ne me suis pas contenté de quelques reportages” explique-t-il, "j’ai cherché la cartographie d’accès à l'eau, fait parler les chiffres, vérifié les données mises à ma disposition et les comptages sur le terrain”. 

Contraintes

Hervé Mukulu confie qu’il a été confronté à la réticence des gestionnaires et des humanitaires. ‘Ils ne voulaient pas intervenir à voix haute à la radio". Deuxième contrainte selon lui, "il faut s’armer de patience pour consacrer tout un mois à un reportage tout en ayant son travail de journaliste radio à côté”. 

Impact des reportages

Le journaliste Fousséni Saibou affirme avoir attiré l'attention des autorités, de la société civile sur la situation des travailleuses domestiques qui sont lésées par rapport aux autres employés.

Pour sa part, Hervé Mukulu confie que son reportage a permis d’ouvrir le débat sur la gestion de l’eau. ‘’Certains comités sont devenus de plus en plus regardants et davantage de gens sont désormais ouverts pour en parler. Dans l'opinion publique, ‘’il y a une certaine prise de conscience, un changement dans cette question d'accès à l'eau à la population’’.


Sara Véronique Doumeyan est journaliste indépendante, passionnée par les nouveaux médias. Outre le numérique, elle s'intéresse à l'économie et aux finances. Diplômée de l'Institut Van Duyse de Formation en Leadership Entrepreneurial (VELI), elle est basée à Lomé, au Togo. Elle est formatrice dans les métiers d'écriture.


Photo sous licence CC via Unsplash, Ibrahim Boran