Paroles d'experts : le point sur la recherche vaccinale contre le COVID-19

Aug 7, 2020 em Couvrir le COVID-19
Dans la rue

Régulièrement, sur le Forum de reportage sur la crise sanitaire mondiale, des webinaires sont organisés avec des experts francophones. Le 30 juillet dernier, le thème traité a été la recherche sur le vaccin contre le COVID-19.

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Plus de 150 vaccins sont en développement dans le monde dans l’espoir de trouver un remède capable d’offrir une immunité face au COVID-19. Mais ce ou ces vaccins seront-ils 100 % efficaces? Quand seront-ils disponibles? Peut-on vraiment compter sur les vaccins? Comment fabrique-t-on les vaccins ?

"Fabriquer un vaccin est beaucoup plus compliqué que concevoir un médicament classique", a déclaré Alain Alsalhani, pharmacien référent vaccins à la Campagne d’accès aux médicaments de Médecins Sans Frontières. Il était l’invité du webinaire organisé le jeudi 30 juillet par le Forum de reportage sur la crise sanitaire mondiale pour faire le point sur la recherche vaccinale comme réponse à la pandémie.

Pour mettre au point un vaccin, il y a, selon lui, deux approches qui, en fait, dépendent des plateformes utilisées par les fabricants. "Des fabricants vont travailler sur des approches classiques comme par exemple avoir le virus entier qu'on va inactiver, ou alors qu'on va atténuer en utilisant des techniques différentes, ou bien ils peuvent employer des approches beaucoup plus innovantes qui vont utiliser du matériel génétique du virus ou de l’ARN".

Mais n’importe laquelle de ces approches, précise-t-il, prend beaucoup de temps, demande énormément d'expertise à la différence des médicaments".

L’approche innovante

Alain Alsalhani explique que l’approche innovante est celle adoptée par la firme américaine Moderna qui a développé "un des vaccins les plus avancés" et dont les premiers résultats affichés sont encourageants.

"Ces approches ne sont pas très établies car en réalité aujourd'hui dans le monde, il n'y a aucun vaccin qui existe contre d'autres maladies qui est basé sur cette technologie-là".

Où se font les recherches ?

"Quand on regarde aujourd’hui le portfolio des vaccins qui sont en train d'être développés, on se rend facilement compte que toute la recherche et tout le développement se font essentiellement sur le continent européen et aux Etats-Unis, a l'exception près de la Chine et un tout petit peu de l'Inde où on a aussi un peu de recherches."

La course aux vaccins est-elle une bonne nouvelle ?

"Oui, c'est une bonne nouvelle si on prend juste l'aspect purement scientifique. En mettant de côté la compétition, d'un point de vue de marché, d'un point de vue économique, c'est une bonne nouvelle puisqu’effectivement on fait face à un nouveau virus contre lequel on n’a pas de traitement aujourd’hui".

Il explique que lorsqu'on voit un vaccin entrer en phase d'essai clinique, en réalité il a 90 % de chance d'échouer. Donc plus on a de candidats en compétition, plus finalement on a de chances qu'un de ces candidats réussisse. 

Quand un vaccin sera-t-il disponible ?

L'expert répond que normalement un processus de recherche et développement et de mise en production d'un vaccin est très long. Souvent on parle en moyenne, dit-il, d'une dizaine d'années pour qu'un vaccin progresse. 

"Le vaccin passe par trois phases qui sont généralement étalées sur plusieurs années. Et ensuite, il faut concevoir un processus de fabrication à grande échelle, puisque pour les essais cliniques, d'habitude, on produit à petite échelle car on essaie le vaccin sur un petit nombre d'individus".

Le futur vaccin sera-t-il accessible à tous ?

Certains pays, comme les Etats-Unis, ont signé des accords avec des laboratoires pharmaceutiques. L'objectif, s'assurer la fourniture de doses de l'éventuel vaccin.

"Donc aujourd’hui, finalement, on se retrouve dans une situation où l'espoir de voir les puissances financières contribuer à un mécanisme mondial de distribution équitable est malheureusement de plus en plus éloigné et on se trouve face à une situation où très probablement les premiers lots de vaccins produits vont aller dans les mains de ces économies riches qui contrôlent non seulement le côté financier mais aussi la majorité des efforts de recherche et développement ".

Par ailleurs, les pays membres de l’OMS, en mai 2020, ont prôné un accès à un futur vaccin, "équitable et abordable". Les 194 Etats membres de l’agence de santé onusienne ont approuvé la résolution prévoyant que tout accès à un futur vaccin et d’autres médicaments soit pour tous "rapide et équitable", "de qualité, sûr et abordable", selon le site news.un.org. 

Le vaccin n’est pas le seul espoir 

Selon le pharmacien, il est difficile de dire que le vaccin est le salut contre le COVID-19 étant donné qu’aujourd’hui il y a beaucoup de choses qu'on ne sait pas. "Le vaccin ne sera pas le seul espoir", déclare-t-il, estimant qu’il faudra continuer les efforts de distanciation sociale", conseille-t-il. 

Pour venir à bout de cette pandémie, il pense que la protection des personnels de la santé est un outil à ajouter dans l'arsenal des pays pour lutter contre le COVID-19.

Sur l’efficacité des vaccins

Il informe que l’Organisation mondiale de la santé n’approuvera pas un vaccin qui montre 20 % ou 30 % d'efficacité. "Des attentes ont été fixées par cette institution par rapport au vaccin."

Il rappelle que "les gens, partout dans le monde, partent du principe que si on est vacciné, on est protégé". Le professionnel de santé déclare qu’il va falloir intégrer cette réalité : même si nous sommes vaccinés, nous pouvons potentiellement tomber malade parce que le vaccin n'est pas à 100 % efficace. Et ce discours, il recommande qu’"il fasse partie de la communication au niveau de la santé publique".


Photo sous licence CC par Max Bender via Unsplash