Paroles d'experts : les bases du journalisme de vérification

par Patient Lukusa
28 mai 2021 dans Lutte contre la désinformation
Un homme prépare des éclairages

Le fact-checking ou journalisme de vérification est un mode de traitement journalistique qui consiste à vérifier de manière systématique des affirmations propagées sur Internet ou sur les réseaux sociaux.

Avez-vous des compétences en matière de vérification des informations ? Savez-vous comment faire une recherche approfondie des images et des vidéos sur Google ? Connaissez-vous les outils permettant d’identifier une rumeur sur les réseaux sociaux ?

Des questions qui ont trouvé des réponses lors du 32e webinaire du 20 mai dernier, initié par le Forum de reportage sur la crise sanitaire mondiale, animé par Kossi Balao.

 

 

L'apparition du journalisme de vérification remonte à il y a quelques années, avec le développement des fake news ou fausses informations. 

Sylvio Combey, journaliste spécialiste du fact-checking, formateur, consultant média ayant travaillé pour TV5, France 24 et Al Jazeera a animé cette formation.

D’où est venu le journalisme de vérification ?

Cet expert a, de prime à bord, rappelé que l’expression "fake news" avait pris de l’ampleur en 2016 avec l’ancien président américain Donald Trump. Selon Sylvio Combey, des médias dont Reuters ont montré que l’ancien président américain avait utilisé l’expression "fake news" 926 fois pendant son mandat.

[Lire aussi : Décrypter comment le public interprète l'information]

 

Poursuivant, Sylvio Combey a catégorisé les fake news en neuf points :

  • La parodie ou la satire : l’information est inspirée d’un fait réel détourné avec une touche d’humour.
  • Le fait alternatif : la mauvaise interprétation des faits réels.
  • L’intérêt de créer une information pour désinformer.
  • La mésinformation : le partage, sans intention particulière, d’information fausse.
  • L’infox : l’information est fabriquée et basée sur les faits imaginaires pour induire en erreur.
  • La théorie du complot : ce que nous voyons n’est pas forcément vrai.
  • Les liens erronés : des titres très sensationnels mais incompatibles avec les contenus.
  • Les postes "vérité" : jouer avec l’émotion pour faire passer son opinion (qui n'est pas toujours la vérité)
  • Le deep fake : faire appel à l’intelligence artificielle pour manipuler une image, vidéo dans l’objectif de tromper.

Comment débusquer une fake news ?

Selon le formateur du jour, trois points essentiels sont à prendre en compte pour découvrir la fausse information : le rouge pour dire stop, l’orange nous renvoie à la réflexion et le vert, vérifier.

Sylvio Combey explique qu'avant de partager n’importe quelle information, il faut vérifier le profil de la personne qui vous l'envoie, se poser toutes les questions possibles, vérifier la section "À propos" du site qui donne généralement des informations sur les auteurs et la ligne éditoriale du site.

Pour cela, poursuit-il, les journalistes peuvent utiliser certains outils de vérifications dont le "hoaxbuster", le "décodex" qui sont des moteurs de recherche de la fiabilité des sources. Il y a aussi l’AFP factuel, CheckNews, 20 Minutes Fake off réalisé avec le concours de Facebook, Vrai ou faux, Conspiracy watch, Les Surligneurs. 

[Lire aussi : Une webradio contre les fake news sur Whatsapp]

Quid des techniques de vérification ?

Sylvio Combey a parlé de ce qu’on appelle "l’observation attentive" : lorsque vous recevez une image d’un accident, prêtez attention aux petits détails dont la météo, les couleurs de véhicules, la langue, les dates, etc.

En outre, d’autres moteurs de recherche d’actualité sont à prendre en considération :

  • Google actualités, Bing actualités, Yandex news : copiez le titre et mettez-le dans ces moteurs de recherche pour vérifier à quand remonte l’information.
  • Recherche inversée sur les images : il y a des techniques comme Google images, Bing images, Yandex images, Baidu Images search, recherche inversée avec Twitter…Voilà pourquoi il est demandé de légender une image pour ne pas tomber dans les fausses informations, a-t-il confié. 
  • Pour les vidéos, il y Citizen Evidence. Il suffit de copier l’URL de la vidéo et le mettre dans ce moteur de recherche pour savoir si la vidéo a déjà été publiée.

Par ailleurs, Sylvio Combey a souligné que l'on peut être fact-checkeur sans être journaliste. 

Dans sa conclusion, Sylvio Combey a rappelé qu’un fact-checkeur doit préférer être la dernière personne à partager une bonne information plutôt que d'être la première personne à partager une fausse information. Il ne doit pas être dans le sensationnel, dans la recherche du scoop.

Un fact-checkeur doit éviter de prendre des positions, d’être militant d’un parti politique et toujours rester neutre. On ne fait pas du fact-checking pour quelqu’un.


Patient Lukusa est journaliste en République Démocratique du Congo, précisément à Lubumbashi dans le Haut-Katanga. Il travaille actuellement à la Radio Phoenix Université et aux médias en ligne 7sur7.cd, Inewsafrica.com et Newscongo.new. Il est passionné par le journalisme scientifique.

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