Les journalistes indépendants vivent une situation angoissante en raison de la pandémie de COVID-19 qui a un effet ciseaux sur les médias. Payés à la pige, ces journalistes ne reçoivent plus de commande d’articles. Précarisés, ces professionnels de médias se demandent comment sortir de l’embarras et faire face à la crise.
Le jeudi 25 juin, cette préoccupation a fait l’objet d’un webinaire au cours duquel le modérateur Kossi Elom Balao, fondateur du journal The Confidential Report et directeur du Forum francophone de l’ICFJ, a posé la question à Jean Michel Mathurin, le producteur exécutif de La Voix de l’Amérique et Gabrielle Brassard-Lecours, la présidente de l’Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ).
Les deux panélistes ont dévoilé les opportunités qui pourraient émerger de cette crise sanitaire pour les journalistes freelances ainsi que des conseils pour face à la pandémie.
Le recours systématique à sa communauté
Lors des échanges, les deux intervenants ont souligné que le réseautage restait l’élément primordial pour le journaliste. Il est indispensable qu’il appartienne à une communauté, une organisation ou association de journalistes. Cela constitue un très grand atout, selon les panélistes.
"Pour tout journaliste, l’élément fondamental, c’est d’avoir des ressources et de développer des réseaux pour pouvoir trouver des gens à qui proposer des sujets que vous trouvez intéressants. Tout journaliste doit faire partie d’un réseau", a insisté Jean Michel Mathurin. L’ancien collaborateur de la chaîne CBS NEWS souligne que développer un réseau est une chose, mais une autre est "de savoir contacter les gens de son réseau et négocier".
Citant en exemple ce webinaire, la présidente de l’AJIQ, pour sa part, a exhorté les journalistes à participer à des rencontres. "Ça permet de créer des liens, de faire de nouvelles connaissances, nouer des contacts un peu partout dans le monde", a-t-elle ajouté précisant qu’elles constituent une énorme opportunité pour tout journaliste surtout pendant des situations telle que la pandémie de COVID-19.
Les deux conférenciers ont estimé que les journalistes doivent avoir la capacité de travailler ensemble avec les gens de leur réseau et échanger avec tout le monde, insistant sur l’aspect réseautage qui selon eux est la grande force du journaliste.
Connaître le média, trouver le bon interlocuteur…
Tout journaliste est tenu de connaître la ligne éditoriale du journal où il écrit ou où il souhaiterait écrire. Pour Gabrielle Brassard-Lecours, il faut que "le journaliste fasse des recherches afin de connaître au minimum le média à qui il souhaiterait faire des propositions de sujets. Dans cette démarche, le journaliste, a-t-elle indiqué, peut aller sur le site du journal, lire des articles pour avoir une idée de la ligne éditoriale et savoir quels sujets proposer".
Elle encourage les journalistes à bien s’exprimer, disposer d’une bonne maîtrise du français. "Si vous écrivez aux médias il faut éviter les fautes d’orthographe, etc. Puisque ça va jouer contre vous. Relisez-vous pour s’assurer de bien vous exprimer", a-t-elle souligné.
Très souvent, les journalistes ne savent pas à qui adresser les propositions d’articles. Ce qui leur rend la tâche un peu difficile. Comme solution, elle propose aux professionnels des médias de se rendre dans la section "A propos" qui se trouve sur le site de chaque journal. Ils trouveront le bon interlocuteur.
Choix du sujet et de l’angle
Pour Jean Michel Mathurin, avant tout, il faut connaître l’audience du média pour savoir dans quelle direction orienter votre papier. Certes, il reconnaît que la pandémie impacte les médias et affecte durement le travail des journalistes indépendants. Mais il pense qu’à côté il y a d’autres sujets, d’autres actualités en dehors de cette crise sanitaire et qui intéresseraient mieux encore les médias.
Partant de ce constat, il exhorte les journalistes à proposer des sujets pertinents, des sujets plus ou moins relatifs à la pandémie ou carrément n’ayant aucun lien avec la crise du COVID-19.
"Il y a la pandémie qui sévit, reconnaît Jean Michel Mathurin, mais aussi il y a les à-côtés, d’autres actualités en dehors de la pandémie. Elles offrent donc des opportunités aux journalistes indépendants. Qu’ils soient basés en Afrique ou ailleurs dans le monde."
Pour réussir son reportage, il paraît évident que le journaliste doit avoir besoin d’un outil de travail (enregistreur, caméra, etc.) Mais il arrive des fois, en Afrique plus souvent, que les journalistes n’aient même pas de quoi enregistrer.
Lorsque de tels cas se présente, "il faut savoir résoudre les défis. Il faut faire avec ce que vous avez en main. Je suis sûr que vous suivez ce qui se passe aux Etats-Unis. Des gens utilisent leurs téléphones portables pour enregistrer des entretiens entre la police et les gens qui sont dans la rue. Ça fait partie de l’accès à ce que vous avez en main", a souligné Jean Michel Mathurin, invitant les journalistes à maximiser ce qu’ils ont comme outil de travail.
Aussi, il a mis l’accent sur la ponctualité. Le journaliste est tenu de respecter la deadline, fournir son travail dans le délai sans dépasser. Mais au cours du reportage le journaliste peut avoir des soucis, rencontrer des obstacles qui pourraient l’empêcher de rendre son papier comme prévu. "Il faut toujours aviser bien avant pour qu’on puisse aménager", a-t-il conseillé.
Savoir utiliser la technologie
La technologie est un atout essentiel pour le journaliste. Il ne peut s’en passer. Elle est un outil de travail, explique Jean Michel Mathurin. "Pendant les tous premiers moments de la crise nous avons demandé à nos collaborateurs de petites vidéos faites à partir de leurs téléphones, pour montrer comment le confinement se vit chez eux", a-t-il déclaré, relevant que l’utilisation de la technologie est aussi capitale pour le journaliste.
Malgré cette crise sanitaire causée qui impacte fortement le travail des médias, les deux panélistes restent optimistes. Ils pensent que les journalistes indépendants doivent garder leur sang-froid et faire preuve de professionnalisme. Car, estiment-ils, il y a toujours des médias qui sont à la recherche de collaborateurs.
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